Scènes

Reims Jazz Festival #15

Le quinzième Reims Jazz Festival s’est achevée le 22 novembre 2008. Une édition qui, une fois de plus, faisait la part belle aux découvertes…


Le quinzième Reims Jazz Festival s’est achevée le 22 novembre 2008. Une édition qui, une fois de plus, faisait la part belle aux découvertes…

Une programmation est toujours l’affaire d’un dosage subtil et délicat, car s’il est vital de chercher à remplir une salle il n’est pas moins nécessaire et légitime d’offrir la possibilité au public de découvrir des artistes actuels, innovants, qui, dans le domaine qui est le nôtre - celui des musiques improvisées - sont cruellement sous-médiatisés. De ce fait, ils ne peuvent toucher qu’un nombre très restreint de personnes passionnées et averties, ce que nombre d’amateurs considèrent comme une incroyable injustice passant sous silence le côté plus dynamique de cette part de la création musicale.

Ainsi, cela fait toujours plaisir de voir un Roy Hargrove, véritable prodige de la musique noire-américaine, qui embrasse cette tradition dans son entier simplement par son jeu, un Henri Texier, référence incontournable de son instrument, entouré de certains des musiciens hexagonaux les plus brillants dans son Strada sextet, des Laurent De Wilde et Otisto 23 avec leurs PC Pieces ou une très sympathique Mina Agossi. Malgré tout, force est de reconnaître que la beauté de la découverte, de la surprise, ne provient que de choses que l’on ne connaît pas encore, ou qui sont en train de s’écrire et de s’inventer. Ainsi, on ne sera pas surpris si j’écris que mes principaux émois m’ont été procurés par les premières parties de ce festival, à l’exception évidemment d’Yves Robert (avec le violoncelliste Vincent Courtois et le batteur Cyril Atef), dont la qualité des projets et la volonté de renouvellement est aussi régulière qu’indéniable.

Le quartet d’Hélène Labarrière, qui a ouvert ce festival à la Cartonnerie en avant-première le 16 octobre dernier, est l’un des groupes les plus passionnants de la scène actuelle, ses quatre membres étant littéralement incontournables dans l’actualité de cette musique ; les jeunes Allemands du trio Hyperactive Kid, découvert au dernier German Jazz Meeting de Brême, développent une musique incroyablement raffinée, englobant une foule d’influences qu’on oublie en l’écoutant, sidéré par le niveau de maîtrise du jeu ; le trio de Benjamin Moussay séduit par son lyrisme ; quant à celui du pianiste berlinois Carsten Darr que l’on espère voir plus souvent de ce côté-ci du Rhin, sa virtuosité, son originalité et son énergie accrochent de prime abord.

Il ne faut pas oublier le quartet Wark du contrebassiste Sébastien Beliah (avec Marc Baron et Sébastien Daures, respectivement aux saxophones alto et ténor, et Guillaume Dommartin à la batterie) ; c’est un de mes coups de cœur de ce festival. Wark propose une musique superbement écrite qui, bien que marquée par la scène new-yorkaise des vingt dernières années, s’inscrit également dans une tradition parfaitement maîtrisée, de même que la création « Progressive Patriots » du guitariste Hasse Poulsen, qui interroge avec maestria nos racines culturelles avec les saxophonistes Stéphane Payen et Guillaume Orti, le contrebassiste danois Henrik Simonsen et une véritable icône du jazz new-yorkais : le batteur Tom Rainey, tous brillants.

Citons également le Lilliput Orkestra, quatre Toulousains qui jouent un jazz définitivement atypique et pourraient illustrer quelques grands films avec bien plus qu’une bande-son. Enfin - c’est loin d’être une découverte mais peu importe - le trio belge Aka Moon qui entretient depuis plus de quinze ans un haut niveau d’excellence, un véritable fonctionnement de groupe (particulièrement rare en jazz), et nous a offert un superbe concert, avec une énergie très rock, proprement incroyable.