Chronique

Margaux Oswald - Jesper Zeuthen

Magnetite

Margaux Oswald (p), Jesper Zeuthen (as).

Label / Distribution : Clean Feed

Cette œuvre qui embrasse l’univers coltranien de la dernière période se partage à parts égales entre la quête d’une élévation spirituelle et l’ancrage à des forces telluriques. L’improvisation, lorsqu’elle aboutit a une telle entité, débarrassée d’un trop-plein de notes, démontre qu’elle est un élément essentiel de la musique contemporaine.

La pianiste genevoise Margaux Oswald n’emplit pas l’espace, elle le configure à sa manière avec une science harmonique qui n’appartient qu’à elle. Ses figures géométriques destinées à amplifier les tensions ou à apaiser les mouvements circulaires du saxophone révèlent sa parfaite connaissance de l’instrument ainsi que sa personnalité attentionnée. Le silence est partie intégrante de sa démarche musicale, elle le magnifie lorsque des immersions dans des micro-tonalités se succèdent. Les trois titres de cet enregistrement public sont complémentaires ; renouvelés avec une progression cyclique, ils conduisent la pianiste à explorer l’échelle des sons du clavier.

L’altiste danois Jesper Zeuthen ne pouvait espérer mieux que la rigueur engendrée par Margaux Oswald pour se laisser aller musicalement, non sans garder un cap. Ses montées en puissance d’une immense limpidité font surgir un kaléidoscope de sonorités abstraites. Fort de sa longue expérience musicale qui l’a conduit depuis la fin des années soixante à travailler aussi bien avec Paul Motian que Terry Riley, il repousse les frontières musicales dans cet enregistrement.

Ce duo composé par Margaux Oswald et Jesper Zeuthen est une chance pour l’avenir du jazz et des musiques improvisées, sa grande cohésion ainsi que son discours universel s’opposent aux impasses stylistiques et esthétiques.

par Mario Borroni // Publié le 12 novembre 2023
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