Chronique

Bill Evans

Treasures

Bill Evans (p), Niels-Henning Ørsted-Pedersen (cb), Eddie Gomez (cb), Alan Dawson (dm), Alex Riel (dm), Marty Morell (dm), The Royal Danish Symphony Orchestra & The Danish Radio Big Band

Label / Distribution : Elemental Music

Un chef-d’œuvre s’offre à nous. C’est bien un trésor qui se découvre avec délectation. L’intensité des sonorités qui habitent cet album recouvre une période comprise entre 1965 et 1969. Bill Evans avait réussi, à la fin des années cinquante, à asseoir les bases de son langage avec beaucoup d’originalité, les interactions entre la contrebasse et la batterie faisant jeu égal avec le piano.

Rares sont les inédits de ce grand instrumentiste aussi fameux que ce bien nommé Treasures, comprenant des pièces enregistrées au Danemark et issues de la collection privée du musicien danois Ole Matthiessen. Si vous entrez dans le climat de ce double album superbe, vous ne le regretterez pas : du solo au trio en passant par des orchestres entièrement dévoués à l’art protéiforme du pianiste, c’est un festival harmonieux.

Nous avons été bercés par « Come Rain Or Come Shine », « Very Early », « Waltz For Debby » « Re : Person I Knew » ou « Time Remembered ». C’est manifestement une inscription à de nouveaux univers dérivés de ces morceaux intemporels qui surgissent. Les partitions connues tanguent, l’espace-temps épouse de nouvelles dimensions. Le canevas structurel laisse libre cours à de nouvelles improvisations.

Deux contrebassistes de haut vol se succèdent, Niels-Henning Ørsted-Pedersen, d’une justesse exemplaire, et Eddie Gomez, toujours prompt à se plonger dans le registre médium, évoquant le champ d’exploration du prodigieux Scott LaFaro. Le talent conjugué d’Alan Dawson et d’Alex Riel s’expose dans les sessions de 1965 et 1966 : deux styles avec une évidence, la batterie est sublimée. Marty Morell intervient magnifiquement dans les sessions de 1969 : son accointance avec Bill Evans transparait de façon décisive. Les deux orchestres vigoureux sont de véritables écrins pour la musique evansienne. Aussi bien au sein d’une orchestration classique qu’avec un big band, le pianiste intègre ses typiques parties rythmiques de manière convaincante, ne donnant jamais l’impression de forcer. A noter que le jeune Palle Mikkelborg , que nous retrouverons vingt ans après avec Miles Davis sur son album Aura, officie ici en tant qu’arrangeur et directeur d’orchestre, permettant par ailleurs une retransmission à la télévision de Copenhague.

Le climat de ce disque est nimbé d’une lueur délicate propre à la rhétorique inimitable de ce pianiste, mais l’ensemble de ces prestations publiques donne matière à attiser des feux d’artifices lorsque l’accélération du tempo génère des solos révélateurs de renouveau. Cet album habité par de nouvelles romances est essentiel