Chronique

Jean-Louis Wiart

Chroniques Allumées

Pendant vingt ans, Jean-Louis Wiart a publié ses chroniques pour la revue Les Allumés du Jazz. C’est un florilège de ces chroniques que les éditions Les Soleils Bleus rassemblent dans une parution soignée, subtilement illustrée par Jeanne Puchol. De très belles illustrations qu’on prend le temps d’observer, offrant un relief, un contour aux idées de Jean-Louis Wiart. Des idées qui, quant à elles, ne tombent pas sous le sens, et c’est le plaisir de ce livre qui ne cesse de nous surprendre. Ces chroniques se lisent sans aucun ordre chronologique, c’est au choix, et pourront se relire dans le temps. Elles auront à coup sûr un retentissement différent à chaque fois.

La notion de temps, voire de tempo, qui conditionne les rendez-vous avec une œuvre artistique, revient souvent sous la plume de Jean-Louis Wiart. On lit les rencontres, les moments, les lieux, la durée, l’oreille qui voit, l’œil qui écoute, la définition d’une mélodie, le plagiat, et puis l’argent qui divise, mais en petites coupures, parfaitement indolores mais bien efficaces.

Autant de thèmes développés habillement pour créer la réflexion et voir qu’avec le temps, tout change vraiment, de la perception d’une création artistique à son habilitation, parfois tardive. Des notions qui conduisent souvent à considérer chaque artiste comme « moins qu’un chien », une idée que l’allusion à Mingus rend limpide. Mais elle n’est pas la seule : le livre fourmille d’allusions et de mises en parallèle. Du cinéma et des romans noirs à l’éloge d’un boulanger parisien, il pourrait sembler que le propos s’éparpille, mais non. Parce que rien de ce qui traverse ce recueil n’est complètement dénué d’une considération politique.

Jean-Louis Wiart s’amuse, non sans une réelle dextérité, en usant d’un sujet pour en développer un autre, de prime abord sans lien direct, mais avec lequel il parvient néanmoins à créer un effet miroir. Ses textes invitent implicitement à interroger l’exercice de la chronique, mais aussi le rôle et les responsabilités de l’industrie, tout comme du public, dans l’accès et la diffusion d’œuvres artistiques. Une façon de rappeler que tout un chacun est concerné et qu’en ces temps où la culture subit une politique répressive, ces chroniques allumées pourraient aussi bien être éclairantes.