Scènes

Donny McCaslin trio au Sunside

Pour la première fois en France, le saxophoniste donnait en avril 2008 un concert sous son nom


Pour la première fois en France, Donny McCaslin donnait un concert sous son nom.

Pour ce concert en trio, le saxophoniste de Steps Ahead, de Maria Schneider et du Dave Douglas Quintet se devait d’être à la hauteur.

Raffinés, touffus, enregistrés en formation de taille moyenne, les deux derniers albums de McCaslin (Soar et In Pursuit) ont fortement marqué les esprits. Il joue ici joue en trio - configuration plus mobile, inattendue chez ce musicien habitué aux formations plus importantes, montées sur le vif, qu’il propose au 55 Bar à New York.

Donny McCaslin intègre dans sa musique de nombreuses influences, dont le rock et les musiques sud-américaines ; c’est donc assez logiquement qu’il fait appel au batteur Adam Cruz. Rencontré au sein du Danilo Perez Group, Cruz se caractérise par sa musicalité, son punch binaire appropriés au power trio. Le choix du bassiste, en la personne de Boris Kozlov à la six cordes électrique, est plus surprenant. Imperturbable, il se distingue de ses deux complices, physiquement engagés dans la musique, par un jeu linéaire au flux de notes renversant. Il est d’une rigueur métronomique et son jeu solide profite considérablement à la cohésion du groupe.

Le répertoire de ces trois sets est constitué de morceaux tirés d’In Pursuit et d’un CD en cours de production avec Jonathan Blake à la batterie et Hans Glawischnig à la contrebasse [1] qui paraîtra en septembre 2008 chez GreenLeaf Music, le label de Dave Douglas.

Comme à son habitude, que ce soit sur le plan relationnel ou artistique, McCaslin est très professionnel. Lors du concert, il fournit à ses musiciens des indications qui tiennent en quelques mots (tempo, distribution des chorus, ponts). Naviguant ainsi en « terrain connu », il peut développer sa verve rigoureuse.
Autour d’une idée qui s’apparente à un riff, il coud son discours avec la rythmique, qui le pousse dans ses derniers retranchements.

La densité musicale caractéristique des power trios pousse les musiciens à l’excès. C’est donc avec un peu de verbiage, au sommum des chorus, que les trois musiciens développent un jeu néanmoins talentueux et inspiré qui aboutit à un dialogue tendu. La musique est explosive et endiablée. McCaslin relève le flambeau là où Dave Binney [2] et Chris Potter ont posé les bases du jazz mainstream new-yorkais, cérébral et souvent précieux. Dans sa ville, il est très présent en club et développe son réseau de musiciens. Avec un style et un son qui lui sont propres, il construit sa musique en concert, avec des musiciens aux styles et expériences variés. En laissant cett liberté à Cruz et Kozlov, il écoute, adapte sa musique et parvient à trouver un mode d’expression personnel dans un contexte inhabituel, signe de grande musicalité.

par Jérôme Gransac // Publié le 1er juin 2008
P.-S. :

Le site

[1musiciens qui giggent régulièrement avec le saxophoniste à New York

[2son producteur