Scènes

François Thuillier Brass trio

au Grenoble Jazz Festival


Dimanche 16 Mars, François Thuillier Brass trio à la Faîencerie de la Tronche ou un après-midi cuivré. Rideau rouge de part en part sur la scène de la Faïencerie à la Tronche. Trois pupitres d’environ 70 cm font face à un public, pour lequel il s’agissait de choisir entre un concert de jazz gratuit, les dernières chances de se fracturer le péroné à ski ou le début du Printemps du Cinéma à 3€ la place

François Thuillier par Charles de Saint André

18h19 la lumière s’éteint. François Thuiller au tuba présente les musiciens qui vont nous accompagner : Daniel Casimir au trombone et Serge Adam à la trompette et au bugle.

Première note de François Thuillier, entre digeridoo et ligne de basse ronde, sur le thème « Vorelponne » de Daniel Casimir en hommage aux Préalpes. Et l’on se dit que le tubiste a appris à jouer avec une méthode de slap pour basse électrique, 12 Kg à bout de groove, avec quelques passages fantaisistes en double note, émission de deux sons sur un instrument à priori monophonique. Les deux autres instrumentistes ne sont pas en reste, mais la performance substantifiquement joyeuse qui sort de cet instrument quelque peu « mémère » crée une surprise certaine.

Ce concert sera un prétexte à « hommager » une variété de gens et de choses. Respect en premier, à Don Cherry sur un thème de Daniel Casimir intitulé « Don has gone » marqué par une exposition longue et dansante de Serge Adam sur une berceuse avec choeur d’éléphants.

Hommage ensuite à la physique quantique avec « Equilibre indifférent » de François Thuiller. Les trois musiciens se mettant en scène en une chorégraphie acoustique improbable, en jouant entre le son direct et la réverbération des murs.

Hommage à Lester Bowie de Serge Adam dans un thème intitulé « Doctor Brass » commençant par une attaque whawhawhante en solo de Serge style New Orléans, virant Free voir musique concrète peut avant l’exposition du thème pour rejoindre une forme classique de be-bop en 4/4.

Hommage ensuite à la grand mère polonaise de François Thuiller avec Caniotta, composition sous forme de musique de là-bas, et où François entre dans sa première respiration circulaire et où la ligne de basse rebondit sur une seule note portée, répétée, écorchée, tandis que Daniel et Serge improvisent sur un tout autre rythme qu’une samba.

Hommage aux aborigènes d’Australie sur Loma Bleu permettant une nouvelle démonstration des talents de François Thuillier sur ce tuba naturellement et énormément digeridoo, avec quelques nouveautés qu’il gardait jalousement pour la fin du set. Tel ce jeu sur les harmoniques empruntant à la technique du chant ahomi, rajouté à l’exercice simultanée en respiration circulaire. On regrettera toutefois que pris par son embouchure, il ne puisse rajouter en prime le claquement de langue qui aurait si bien convenu sur ce titre, de sa composition. A la fin du morceau François nettoiera ses coulisses encrassées par le sable imaginaire de ce désert austral.

Hommage littéraire de Daniel Casimir en contrepoint et fin de poisson avec le titre « The Beautifull Loser ». Et cet instant climax du concert avec l’hommage aux musiques nouvelles de Serge Adam intitulé « Jungle Team ». Pour résumé et en moins de 4 minutes, nous y aurons vu une pseudo fanfare manquant d’improvisateur une fois le thème ressassé jusqu’à plus soif, une tentative courageuse d’El Condor Passa pour trois pistons à l’envers, Serge Adam essayant vaillament d’y souffler une quelconque mélodie, un sos scratch trombone réaliste et avec le geste de Daniel Casimir, le tout produisant à l’image de cette fin d’après midi, une impression de « très drôles » et de « très jouissives » rencontres.

Hommage enfin, avec le printanier Les roses de Picardie, standard trop peu joué et absent du Real Book, où François Thuillier dans une interprétation confinée façon 1920 en « papoumpapom » sobre et désuet nous rappelle que c’est merveilleusement libre le jazz.

par // Publié le 29 mars 2003