Tribune

La dernière révérence de Marc Moulin

Pilier de la vie culturelle belge et européenne Marc Moulin, décédé le 26 septembre, laisse la scène du jazz orpheline.


Pilier de la vie culturelle belge et européenne Marc Moulin, décédé le 26 septembre, laisse la scène du jazz orpheline. Au printemps 2007, à l’occasion de la sortie de son dernier album chez Blue Note, I Am You, Etienne Payen s’était longuement entretenu avec cet « inlassable artisan de découvertes ».

Fils de l’essayiste et poétesse Jeanine Moulin et du sociologue et écrivain Léo Moulin, Marc Moulin est né en 1942. Le milieu intellectuel où il a grandi a formé le terreau d’éclectisme culturel et artistique où il s’est épanoui toute sa vie. Atavisme oblige, il étudie les sciences politiques et économiques, mais s’oriente rapidement vers la musique et l’écriture.

En 1961, il forme un trio qui devient rapidement l’une des sections rythmiques préférées des musiciens américains de passage en Belgique tels que Johnny Griffin ou Don Byas. C’est également au début des années soixante que commence sa coopération et son amitié avec Philip Catherine au sein du quintet d’Alex Scorier. En 1969, Catherine et Moulin forment Placebo, l’un des premiers groupes de jazz à introduire des éléments rock, précurseur de ce qui deviendra le « jazz fusion ».

Marc Moulin © Yves Budin (www.myspace.com/yvesbudin)

1975 est un jalon important dans sa carrière ; il publie en effet un album resté célèbre : Sam’ Suffy avec Richard Rousselet à la trompette et Bruno Castellucci à la batterie. Par la suite, avec le groupe Telex, créé en 1978, Moulin s’oriente davantage vers la musique de variété.

C’est en 1999 que Blue Note l’invite ; ainsi naîtront « Top Secret », « Entertainment » et « I Am You » qui marquent un retour du musicien à un jazz de salon (comprendre lounge ou easy leastening), imprégné d’électro.

Parallèlement à ses activités musicales, Moulin aura été humoriste, animateur de radio, journaliste (savoureuse chronique sur Télémoustique), auteur de théâtre, compositeur, mais également producteur, notamment d’Alain Chamfort, de Lio (si, si, la chanteuse de « Banana Split ») ou encore des Sparks. En 2007 le journaliste Thierry Coljon a publié la biographie de cet homme hors du commun : Les neufs vies de Marc Moulin.

Pour paraphraser la réponse que Moulin avait donnée à la question « Que feriez-vous d’une baguette magique ? », on pourrait répondre : « Faire revenir Marc pour qu’il nous joue tout ce qu’il n’a pas eu le temps de nous faire écouter… »

Merci à Yves Budin pour l’autorisation de reproduire ses peintures.

Marc Moulin © Yves Budin