Chronique

Massimo Biolcati

Persona

Inutile d’attendre la troisième note pour saisir la qualité de ce projet.
C’est le contrebassiste d’origine italo-suédoise Massimo Biolcati qui mène la barque. A priori, sur le papier, le défi semble relevé par la présence d’incontournables magiciens contemporains, en la personne de Lionel Loueke à la guitare, Jeff Ballard à la batterie et Peter Rende au piano. Lizz Wright et Gretchen Parlato occupent la partie vocale sur un morceau chacune, « Winterhouse » et « Clouds ».

Ce merveilleux premier disque comptant dix compositions originales est divisé en deux parties distinctes. Tout d’abord « Motion », qui inclut les pièces énergiques du répertoire, puis « Stillness », qui regroupe des balades plus intimes aux reflets nocturnes. Tout le disque met en évidence une énergie homogène, un remarquable terrain de jeu pour chaque soliste et donc, à chaque instant, un pur régal d’écoute. Il s’ouvre d’ailleurs sur une composition aussi déroutante que le premier chorus du guitariste béninois [1]. Ce thème s’articule de façon originale avec deux lignes mélodiques entrecroisées. L’une : doublée par la contrebasse et la main gauche du pianiste, est en opposition avec l’autre, interprétée par la main droite de Rende doublée d’une guitare aux reflets électroniques. L’étrangeté de cet arrangement attise l’oreille pour la suite du voyage.

Ici domine un esprit jazz-rock rappelant les belles heures du collectif Steps Ahead. Le synthétique laissant sa place à un côté plus africain apporté par le timbre de la guitare et par le chant de l’instrumentiste doublant ses notes tel un Georges Benson inspiré. La poésie transparaît dans tout le répertoire, transmettant une généreuse efficacité d’improvisation. Dans un des titres d’environ huit minutes, intitulé « Transference », se conte une fable en plusieurs parties, différentes dans leurs constructions rythmiques complexes. Outre cette approche à la fois simple et fantaisiste des sonorités africaines (basée essentiellement sur les polyrythmies) se remarque une touchante sensibilité, toujours au service d’une interaction musicale hors norme.

Idéale transition vers le deuxième asoect du disque, un « Stillness », beaucoup plus sensuel grâce à la voix de Lizz Wright. Le groupe se mue alors en cocon, et adopte une posture d’accompagnement tout en souplesse et raffinement sonore. Observons également le caractère percussif des peaux choisies par Jeff Ballar, connu pour être relativement polyvalent dans tous les projets auquel il participe.

Ce merveilleux disque se referme sur une complainte interprétée à l’accordéon par le claviériste Peter Rende, qui lui aussi agrémente de sa voix celle de son instrument. Ainsi se termine un majestueux voyage au gré de vertueux accents de lyrisme accessibles à toutes oreilles prêtes à se laisse embarquer sur les vagues magiques du rêve…

par Tristan Loriaut // Publié le 12 juin 2008

[1qui, doit-on le rappeler, est un habituel sideman dd’Herbie Hancock