Chronique

Rémy Gauche

Panamsterdam

Rémy Gauche (g), Benni von Gutzeit (vl), Shankar Kirpalani (b), Jens Ellerhold (d), Alice Zulkarnain (voc), Thomas Savy (b cl), Stéphane Kerecki et Anne Paceo (d).

Panamsterdam a été enregistré en 2007 quand Rémy Gauche partageait son temps entre le Conservatoire Supérieur d’Amsterdam et Paris.

Il met ici en musique ses deux groupes. Dans le quartet hollandais, au violon de Benni von Gutzei s’ajoute le trio rythmique : Gauche, Shankar Kirpalani à la basse et Jens Ellerhold à la batterie. La chanteuse Alice Zulkarnain rejoint le quartet pour un morceau. Dans le quartet parisien, la clarinette basse de Thomas Savy se joint à la basse de Stéphane Kerecki et à la batterie d’Anne Paceo.

C’est cette formation parisienne qui ouvre Panamsterdam avec « Chelsea Bridge », célébrissime standard de Billy Strayhorn composé en 1941. La hollandaise prend la suite pour cinq compositions signées R. Gauche, puis les Français concluent l’album avec « All Or Nothing At All », tube écrit en 1940 par Arthur Altman et Jack Lawrence, suivi d’un morceau de R. Gauche.

Les musiciens ont gardé de leur formation classique une justesse, une précision et une netteté qui s’inscrivent parfaitement dans la musique soignée du guitariste. Von Gutzeit et Savy jouent tous les deux avec beaucoup d’élégance. Si le violoniste penche souvent vers un esprit XXè (« Des abîmes aux cimes ») ou folk (« African Mood »), le clarinettiste navigue davantage dans les eaux d’un « free apaisé » avec la maîtrise qu’on lui connaît. Ellerhold emmène volontiers sa batterie dans des contrées funky (« Rémy’s Tune ») ou vers des rythmes musclés (« Des abîmes aux cimes »), là où Paceo préfère un jeu musical, léger (« Chelsea Bridge ») et un à-propos subtil (« The Straw That Breaks The Camel’s Track »). De sa voix vaporeuse Zulkarnain scande « Despite All » dans le registre médium, prélude à un duo de toute beauté entre Kirpalani et Gauche. D’un naturel plutôt vif (voir le chorus de « The Straw That Breaks The Camel’s Track ») Kerecki sait aussi se montrer raffiné, en fonction du contexte (« All Or Nothing At All »). Kirpalani est aussi à l’aise à l’archet (introduction de « Rémy’s Tune ») qu’en walking (« Take A Breath ») et fait montre d’une mise en place exemplaire (« Despite All »). La sonorité claire et ouverte (« Take A Breath ») de Gauche sert à merveille ses lignes sinueuses (« Chelsea Bridge ») et son lyrisme équilibré évite l’écueil de la mièvrerie.

Mélodieux, maîtrisé et toujours rythmé, qu’il soit des Pays-Bas ou de France Panamsterdam reste dans le même esprit ; en outre, il a tout du « collector » : autoproduit, sa pochette a le charme des objets artisanaux - carton à gros grain, photo d’esthète, caractères script… et erreurs mineures (« Kéréki » au lieu de Kerecki ou le « é » de Paceo)… Un bel objet !


  1. « Chelsea Bridge », Billy Strayhorn (5:39).
  2. « Des abîmes aux cimes » (11 :40).
  3. « Rémy’s Tune » (6 :59).
  4. « African Mood » (7:02).
  5. « Take A Breath » (4:44).
  6. « Despite All », Gauche & Zulkarnain (5:23).
  7. « All Or Nothing At All », Arthur Altman & Jack Lawrence (5:04).
  8. « The Straw That Breaks The Camel’s Track » (6:32)