Le Lion et le Tigre
Quand en 1972 à New-York le Lion rencontra le Tigre
Il lui tint à peu près ce langage :
« Mais quel est ce swing qui de vos fûts surgit sans ambage ?
Si votre grosse caisse est, par ses accents, votre brillant pelage
Et que votre caisse claire vous donne les atours d’un grand sage,
Vous êtes certainement le seigneur des hôtes de Harlem,
Car de vos tambours jaillit la vie elle-même »
Alors le Tigre fit rugir ses cymbales de plaisir
Se délectant du jeu enflammé d’un piano nommé désir.
Si ses griffes se faisaient baguettes,
C’était pour mieux caresser la crinière d’un Lion dans la tempête
Car sous la houlette de Panassié père-et-fils
(Oui c’étaient des réacs mais arrêtons d’en faire un pastis)
Le Lion et le Tigre rugissaient plus que jamais
En vraies racailles du ghetto qu’ils étaient
Aussi le Tigre s’adressa au Lion :
« Guillaume (car il s’appelait Willie, ce Lion)
Soyez assuré de ma plus profonde jubilation
Car sous vos doigts ce sont quatre-vingt-huit touches
Qui font « maman » quand on les touche
Puisque sous votre stride si torride
Les amants qui jouissent ne prennent pas une ride »
Et c’est ainsi que le Lion et le Tigre, le Tigre et le Lion,
Ne firent plus qu’Un jusqu’à la fin des temps.