Chronique

Jamie Saft

Ticonderoga

Joe McPhee (ts, ss), Jamie Saft (p), Joe Morris (b), Charles Downs (dm)

Label / Distribution : Clean Feed

Le titre de cet album se réfère au nom mohawk d’un lieu dans l’état de New-York où des cours d’eau se rejoignent, et où cette séance a eu lieu, suite au désir commun exprimé par Jamie Saft et Joe Morris de rendre hommage au Live At The Village Vanguard Again de John Coltrane. Pour cela, ils ont souhaité retrouver Joe McPhee [1] et le batteur Rashid Bakr qui, pour l’occasion, a repris son nom de naissance, Charles Downs.

McPhee sans trompette de poche, dans un contexte un peu moins « ouvert » que d’habitude. Et cela lui convient tout à fait. La surprise vient tout d’abord de ce son de ténor oublié, ce souffle de derrière les années, cet envol, cette pulsation de la contrebasse de Joe Morris, les vagues de Jamie Saft, et les bondissements rythmiques de Charles Downs. Climat plus apaisé dans « Simplicity Of Man », même si la révolte, qui n’est pas loin, hésite entre expression de la colère et appel aux hymnes dans la plus pure tradition aylerienne.

Nous suivons Joe McPhee dans ses « arches » et ses « ponts » depuis des années, il a des partenaires en France qui lui doivent et qui lui ont apporté ; c’est un musicien dont il faudra un jour souligner l’excellence, la hauteur de vue… en un mot : la noblesse. Des qualités d’âme qui ne viennent pas « à la place » de ses talents de musicien, mais les complètent avec une belle opportunité et rendent sa fréquentation inoubliable.

C’est d’abord au soprano qu’on l’entend dans « Leaves Of Certain » et « A Backward King ». Dans ce dernier titre, Jamie Saft improvise longuement avec délicatesse, avant un final emporté qui voit McPhee reprendre le ténor et conclure dans une ambiance ensoleillée.

par Philippe Méziat // Publié le 13 décembre 2015

[1Qui était présent au Village Vanguard quand Coltrane a enregistré le fameux disque