Chronique

Alchemy Sound Project

Afrika Love

Sumi Tonooka (p), Salim Washington (ts, vcl, fl, ob), Erica Lindsay (ts, cl, alto fl), Samantha Boshnack (tp), David Arend (b), Michael Ventoso (tb), Chad Taylor (dms)

Label / Distribution : Artists Recording Collective

Passés sous les radars bien que l’orchestre existe depuis plus de cinq ans, les musiciens étasuniens de Alchemy Sound Project (ASP) s’invitent à nos oreilles avec la sortie de Afrika Love, troisième album d’un septet des plus réjouissants. Diablement égalitaire même si la pianiste Sumi Tonooka semble apporter toute sa science de la composition, ASP est au carrefour de plusieurs cultures, notamment grâce à la présence du multianchiste Salim Washington, installé depuis de nombreuses années en Afrique du Sud. Il offre avec « The Fountain », ouverture lumineuse et vitaminée, un parfum d’Afrobeat dans une écriture par ailleurs très chambriste et marquée par le jazz contemporain et un certain héritage mingussien : ainsi de « Dark Blue Residue », où le batteur Chad Taylor fait montre d’une grande complicité avec le jeu très percussif de Tonooka.

Plus loin, on note d’autres liens forts, notamment entre la pianiste et la contrebasse de David Arend. Le solo de ce dernier dans « Afrika Love », au centre de l’album, est une petite merveille qui joue avec les dissonances, fruit d’une grande culture classique apprise au sein de nombreux orchestres symphoniques, notamment à Oakland. On perçoit une grande cohésion dans cet orchestre, notamment dans les arrangements des soufflants ; Washington est un joueur de hautbois à suivre, qui donne de la consistance à de nombreux contrepoints, tout comme la trompettiste Samantha Boshnack. Voici un nom à noter de toute urgence : le jeu est élégant et chaleureux, notamment sur « The Cadillac of Mountains » où elle joue au chat et à la souris avec le trombone de Willem de Koch et la clarinette basse de Washington. Sur ce morceau, quelques essences latines viennent décentrer le thème africain, abordé non comme un hommage lointain, mais plutôt comme une référence, un puits d’inspiration intarissable.
 
On pensera, de loin en loin, à certaines explorations abstraites d’un ailleurs, ou d’un berceau de l’Humanité conséquemment berceau de la musique, comme on l’entendait par exemple dans le Root Down de Tommy Meier. On prend plaisir à cette belle découverte, portée par des musiciens talentueux et très soudés dont on s’empressera de consulter la discographie pour de nouvelles découvertes.