Pour avoir assisté à un concert de ce groupe sous le chapiteau du Magic Mirror au festival Jazz sous les Pommiers de Coutances, je connais la force magnétique qui s’en dégage. L’énergie est souvent contenue puis soudain relâchée, comme une digue qui cède.
Bien sûr, le charisme du leader, compositeur et trompettiste Avishai Cohen entraîne le public sans mal, l’adhésion est large. Et l’instrumentation, avec les deux batteries, le couple basse-guitare, donne une coloration rock très forte tout en laissant à la trompette un rôle aérien et parfois évanescent en transformant les mélodies en mélopées et les phrases en allégories.
Le projet Big Vicious est plutôt collaboratif : plusieurs des morceaux sont collectifs, fruits d’une improvisation et d’une écoute fertile, mais il n’hésite pas à reprendre Massive Attack ou Radiohead.
L’usage modéré et opportun de l’électronique donne une connotation urbaine et moderne à cette musique qui oscille entre transe rythmique et ambiances flottantes, un mélange parfait pour la scène, pour les fins de soirées festivalières, pour les bandes-son de films urbains où des héroïnes antidémocratiques boivent des cocktails Cosmopolitan à base de canneberge sur des terrasses de gratte-ciel en appelant Beethoven par son prénom.
On note d’ailleurs une reprise tout à fait étonnante et qui fait figure de fève dans ce disque, de la mélodie de la Sonate n°14, opus 27 dite « au clair de lune » du susnommé Ludwig Van Beethoven par une trompette aussi magistrale que juste sur un fond de basse-batterie entêtant.
Avishai Cohen est surprenant et inventif, deux qualités qui, en musique, permettent de réaliser de très belles choses. Réjouissons nous.