Chronique

Dadèf Quartet

Labyrinthe

Raphaël Sibertin-Blanc (vln, kemençe) , Simon Charrier (cl), Guillaume Gendre (b), Carsten Weinmann (dms)

Label / Distribution : Autoproduction

Le jazz des steppes de Raphaël Sibertin-Blanc, violoniste et âme du Dadèf Quartet, est du genre nomade. Comme ses glorieux aînés du Hadouk Trio dont on perçoit quelques influences dès que commence la ritournelle de « Nain Rouge », où les pizzicati du violon entraînent la clarinette de Simon Charrier dans la danse, Dadèf n’est pas du genre à rester en place. Certes, la contrebasse de Guillaume Gendre rattache la syntaxe du quartet au jazz sans que l’affirmation soit définitive. Il en est de même pour la batterie de Carsten Weinmann, vieux complice du violoniste avec qui il anime le duo Un pied dans le vide. Les steppes se moquent des postes-frontières et s’étendent sans se poser d’autres questions

Dans le bien nommé « Cheminements », c’est l’Orient qui vient frapper aux portes d’une danse balkanique où la clarinette tournoie avec beaucoup d’insouciance. C’est un trait commun à tout l’album où la liberté se fait joyeuse, presque enfantine parfois. Le solo de contrebasse, assez lyrique, marque cependant une rupture. Ou plutôt une volonté de regarder ailleurs : dans les répertoires klezmer suggérés par Charrier dont le son très pur fait merveille (« Départ », où l’on songe souvent à des orchestres comme L-Rom ou BeyLer.Bey) ou dans les références ottomanes du kemençe, viole jouée également par Sibertin-Blanc (« Zephyrus Birth »). Dadèf se sent à l’aise dans de nombreuses traditions qu’il effleure. Il ne s’enferme dans aucune… Trop content de pérégriner.

C’est le sens de « Labyrinthe » qui donne son nom à l’album : un thème entêtant qui semble revenir sur plusieurs formes tout le long du disque ; plutôt un fil d’Ariane, donc qui guide les voyageurs de Dadèf au gré du courant, d’autant que la légèreté est omniprésente. Les quatre musiciens ne sont pas des collecteurs de folklores. Leur imagination est sans frontières et zigzague du Danube au Bosphore en oubliant de se poser vraiment. Dépourvues de bagages et semelles au vent, les balades dans le labyrinthe de Dadèf trouvent toujours une issue lumineuse : pas de grande révolution mais un enthousiasme partagé et communicatif.