Chronique

Dan Rosenboom

Polarity

Dan Rosenboom (tr, bugle, tr. quart de ton), Gavin Templeton (as, bs), John Escreet (p, synth), Billy Mohler (cb), Damion Reid (dm)

Label / Distribution : Orenda Records

Dès les premières mesures, on devine que la musique de Polarity est née aux États-Unis : le phrasé particulier et le développement des thèmes nous transportent derechef à Los Angeles, avec vue sur l’océan Pacifique.

Dan Rosenboom s’est parfaitement entouré pour ancrer son album dans une contemporanéité réussie. Chacun des membres du quintet brille par son inventivité et avant tout par une grande technicité. Le morceau d’ouverture nous renvoie à la période des longues suites bigarrées qu’enregistrait Herbie Hancock avec ses Head Hunters : « The Age of Snakes », pièce chatoyante de presque vingt minutes où la montée en puissance progressive nous catapulte par instants dans les paysages mystérieux de Bitches Brew. Le parfum suranné de la construction mélodique n’empêche pas une approche rythmique bien actuelle. La superbe intervention de John Escreet au synthétiseur dans le mouvement final est plus qu’exaltante, c’est une réussite quasi magnétique. Dans « A Paper Tiger », le trompettiste se joue des difficultés harmoniques et sa complicité avec son collègue saxophoniste très inspiré Gavin Templeton laisse pantois : c’est un festival pyrotechnique où Anthony Braxton ne serait aucunement dépaysé.

Des accalmies tout de même, avec les paysages plus familiers que sont « Walking Shadows », à l’ambiance typiquement américaine, et « On Summoning The Will », habité par un lyrisme qui rappelle Kenny Wheeler. La section rythmique est constamment aux aguets, rebondissant avec pertinence, en particulier dans « War Money ».

Dan Rosenboom et son quintet ont de beaux jours devant eux. Ce disque résume une aventure collective particulièrement réussie. Mention spéciale justifiée pour l’originalité du jeu pianistique dissonant de John Escreet et pour la sonorité chaleureuse du saxophone baryton de Gavin Templeton.