Chronique

Potsa Lotsa XL

Chamber Works

Label / Distribution : Trouble in The East

Nommé ainsi en référence à un morceau d’Eric Dolphy, le quartet Potsa Lotsa de Silke Eberhard a évolué depuis ses débuts, consacrés comme de juste à l’œuvre de Dolphy, tant en termes de taille qu’en termes de répertoire. Il fut Potsa Lotsa Plus en septet toujours autour de Dolphy il y a dix ans. Devenu XL pendant les périodes de confinement [1], Potsa Lotsa s’est transformé en une formation capable de faire aboutir les idées de la saxophoniste allemande, qui participe par ailleurs au Trans Europe Express de Hans Lüdemann. Portant un projet contemporain, Potsa Lotsa XL est un orchestre heureux d’aller à la rencontre de musiciens d’autres cultures, à l’instar de la rencontre avec la coréenne Youjin Sung.

Avec Chamber Works, il se concentre sur un répertoire riche et complexe où l’esprit de Dolphy et surtout la couleur de ses orchestres n’est jamais trop éloignée, comme l’atteste « The Fink Panther ». Le morceau s’articule autour de deux axes : le violoncelle de Johannes Fink et le vibraphone de Taiko Saitō d’un côté, la trompette de Nikolaus Neuser et le trombone de Gerhard Gschlößl de l’autre, et il impressionne par sa souplesse, notamment en l’absence de piano et de batterie. Car sur la plupart des morceaux de ce Chamber Works, même dans le liminaire « A Presto » et son affolement d’orchestre, le Potsa Lotsa XL a rétréci sans passage par le tambour de la machine, devenu sextet comme mieux travailler la finesse des échanges (« Mochokidae », dont la construction évoque par instants le travail de Roscoe Mitchell).

Parfois, Eberhard revient à une formule en tentet (« All Alone 1 & 2 »), où le piano d’Antonis Anissegos bâtit de belles choses avec le vibraphone, central dans cet orchestre. Il est intéressant de constater que l’élargissement de l’orchestre ne noie pas le propos, et que Chamber Works conserve cette agilité qui lui confère une grande liberté. A l’inverse de Gaya où elle était très accaparée par la direction d’orchestre, Silke Eberhard reprend ici une place prépondérante à l’instrument, étincelante dans « Cyprinidae », sans doute le morceau le plus excitant de ce format très court, qui annonce à coup sûr une direction nouvelle.

par Franpi Barriaux // Publié le 28 avril 2024
P.-S. :

Silke Eberhard (as), Taiko Saito (vib), Jürgen Kupke (cl), Nikolaus Neuser (tp), Patrick Braun (ts), Gerhard Gschlößl (tb), Johannes Fink (cello), Antonis Anissegos (p), Igor Spallati (b), Kay Lübke (dms)

[1Voir notre article de 2022.