Chronique

Doudou Swing

Doudou à feu doux

Philippe « Doudou » Cuillerier (voc, g), Victorine Martin (g), Antonio Licusati (b), Emy Dragoï (acc), André Venturini (steel-guitar Fender 8 cordes)

Label / Distribution : Frémeaux & Associés

Doudou à feu doux, premier album de Doudou Swing (2004), reparaît cette année chez Frémeaux et Associés. Dans le vaste monde du swing manouche, il complètera idéalement les enregistrements des virtuoses du genre tels Biréli Lagrène ou Angelo Debarre.

En effet, si le style manouche est habituellement connu pour ses improvisations d’une incroyable vélocité, le groupe mené par Philippe « Doudou » Cuillerier se concentre essentiellement sur le socle rythmique du swing, qu’il place avant tout au service de la chanson. Car Doudou à feu doux est en premier lieu un disque de chansons, aux thèmes aussi variés que leurs arrangements. D’un texte à l’autre, Cuillerier fait l’apologie des femmes callipyges chères à Brassens (« Vive les rondes »), vante son propre style capillaire plus qu’épuré (« Boule de billard »), ou révèle la recette du hérisson à la cocotte (« Latcho Raben »). Quelques reprises figurent également au répertoire : « Le chemin des forains », naguère chanté par Piaf, ainsi que trois morceaux qui plairont aux enfants : « Boum Dam Amsterdam » qui reprend mot pour mot le poème de Max Jacob « Musique acidulée », et surtout deux titres issus du Livre de la Jungle, « Aie confiance » et « Je voudrais être un homme comme vous », rendus encore plus irrésistibles par la présence d’André Venturini qui leur confère un swing étonnant à l’aide de sa guitare lap-steel façon hawaï. Avec de tels sujets, on le devine, l’ambiance est principalement joyeuse, un peu potache, même si une certaine forme de nostalgie est, ponctuellement, de la partie, à travers une courte évocation de la perte des racines des romanichels (« Ay Romalen »).

Magistralement soutenu par sa section rythmique, Philippe Cuillerier, guitariste tenant la « pompe » pour les plus grandes pointures manouches depuis près de vingt-cinq ans, dévoile ici une autre facette de son talent : le chant. La voix est claire et la diction irréprochable dans les ballades comme dans les morceaux plus rapides. « Doudou » est un chanteur polyvalent, allant du crooner au conteur d’histoires, sans oublier une belle maîtrise du scat. Son interprétation rappelle parfois celle du comédien totalement investi dans le texte, en particulier sur les chansons les plus humoristiques ou enfantines. On ressent à ce propos une réelle affinité avec le jeune public, qui se concrétisera d’ailleurs quatre ans plus tard avec l’excellent Mister Django et Madame Swing.

Un auteur compositeur interprète brillant, un groupe vif et homogène, un répertoire original et varié, et l’énergie de la scène parfaitement restituée dans un enregistrement de studio : quatre bonnes raisons de ne pas passer à côté de cet album.