Chronique

Eric Longsworth - World Kora Trio

Korazon

Eric Longsworth (cello, comp), Chérif Soumano (kora, comp), Jean-Luc Di Fraya (perc, voc).

Label / Distribution : Passé Minuit

À peine deux ans après leur rencontre, le violoncelliste américain Eric Longsworth, le joueur de kora malien Chérif Soumano et le percussionniste et chanteur marseillais Jean-Luc Di Fraya enregistrent chez Passé Minuit Korazon, un disque entre « world », pop et improvisation qui invite à la danse et à la rêverie.

Installé en France depuis 2002, Longsworth a collaboré avec des nombreux artistes sous de nombreuses formes : duo, trio, quartet avec À ciel ouvert en 2008, ou au sein d’un spectacle de clown, Le jazz fait son cirque. Il a également sorti un album solo en 1997, I Hear You. On retrouve ici l’univers qu’il construit depuis plusieurs années : étiré, son violoncelle aime les grands paysages et les longues traversées. À cette dimension relativement horizontale, les percussions de Di Fraya offrent un excellent contrepoint, tandis que la kora saute de l’un à l’autre comme un caméléon sonore.

Chérif Soumano et Eric Longsworth se sont rencontrés à Rochefort pendant le festival Rochefort-en-Accords, qui se proposait d’unir trois continents : Europe, Amérique et Afrique. C’est comme si le vœu de ce programme se trouvait réalisé dans ce disque syncrétique qui, en plus des espaces, mêle tradition classique (Longsworth, improvisateur qui a gardé des traces de ses années de formation), jazz (Di Fraya, diplômé du CNR de Marseille) et musique traditionnelle malienne (les Soumano, joueurs de kora de père en fils).

Violoncelle et kora, parfois inextricables, parfois complémentaires, chantent des mélodies lyriques et populaires à la fois, scandées par des percussions discrètes et régulières. Les développements lyriques d’Eric Longsworth à l’archet sont délicatement sertis dans l’écrin de mélodies directes et chantantes. Le dépouillement des thèmes n’est qu’apparent, sous-tendu qu’il est par des constructions rythmiques d’une grande finesse. Cette légèreté propre aux bons artistes, on la retrouve chez les trois musiciens, mais elle est hélas assortie de la mièvrerie indissociable des bons sentiments. Comme chez Hadouk Trio, la musique flirte dangereusement avec le kitsch. Les sonorités « world » de la kora sont lissées par le violoncelle et le chant de Jean-Luc Di Fraya qui, s’il est irréprochable techniquement, est la précieuse cerise de ce gâteau rose bonbon. Pour les amateurs de monde idéal.