Chronique

Gilad Atzmon & The Orient House Ensemble

Refuge

Gilad Atzmon (as, ss, cl, voc, piccolo, électronique, flûte shabbabeh), Frank Harrison (p, fender rhodes, électronique, orgue farfisa, juno 6, harmonium), Yaron Stavi (b), Asaf Sirkis (dms), Paul Jayasinha (tp)

Label / Distribution : Enja Records

Ceux qui suivent le travail de Gilad Atzmon et de son groupe, l’Orient House Ensemble, connaissent le haut degré d’engagement politique et esthétique de l’artiste au sein de son
oeuvre. L’Orient House Ensemble a été fondé en 2000 dans l’espoir de rapprochement de communautés en conflit autour d’une musique fédératrice, à commencer par les communautés
israélienne (patrie d’Atzmon) et palestinienne.

Dans les albums précédents Exile puis musiK, le propos était clair et revendiqué. Avec ce nouvel album, intitulé Refuge et dont la pochette
représente une coquille d’escargot, la ligne directrice est toute aussi claire : l’espoir fondateur initial ne s’étant pas concrétisé, seule reste la musique comme ultime refuge, lorsque la conscience et les idéologies ont disparu.

Ce constat d’échec donne au disque une teinte particulière, empreinte de mélancolie tout en conservant une certaine énergie. Comme un baroud d’honneur avant de baisser les bras. Un
morceau au titre évocateur comme « The Burning Bush » est un véritable coup de gueule qui, après avoir débuté autour d’une mélodie orientale, tourne au final en un déferlement free.
Au contraire, « My Refuge » illustre la joie que peut (encore) véhiculer la musique, en commençant par un duo assez intimiste entre Atzmon et son batteur et en s’achevant par une
inattendue et joyeuse salsa. Mais les autres titres restent en majeure partie des ballades, dont certaines recèlent une immense puissance émotionnelle, notamment grâce au jeu de
Gilad Atzmon. Celui-ci emplit l’espace, aux saxophones comme à la clarinette, et son utilisation des ornementations est particulièrement pertinente, surtout sur les rythme lents : elles sont alors employées non comme de simples notes secondaires, mais dans un vrai souci d’enrichissement et de développement mélodique.

Autour du leader, le son de l’Orient House Ensemble reste globalement le même, tout en subtiles associations d’influences orientales, d’instruments de diverses origines et - nouveauté sur cet album - d’une touche d’électronique apportant une certaine modernité. Avec Refuge, Atzmon est peut-être à un tournant en terme de composition mais manifestement, même lorsque l’espoir semble peu à peu s’éteindre, son travail reste intelligent et passionnant. Un artiste à suivre.