Tribune

Jazz en L’R : comment inventer et jouer du jazz en Languedoc-Roussillon


Le jazz « en région » est encore bien vivant, et ce tout au long de l’année. Et il est probable – en admettant que le phénomène soit mesurable – qu’il le soit aujourd’hui plus qu’hier, n’en déplaise à beaucoup de grincheux (ils sont toujours trop nombreux). Sans doute parce que des hommes et des femmes se battent pour la musique qu’ils jouent et qu’ils aiment.

En Languedoc-Roussillon, et entre Nîmes et Junas et, à l’autre bout, près de l’Espagne, près de Perpignan, il y a Montpellier, et aussi Sète. Outre un nombre incroyable de lieux, villes ou villages, par exemple Conilhac-Corbières qui, avec ses quelques 850 habitants, organise tous les ans un festival au mois de novembre avec des musiciens venus de toutes les planètes du jazz. Puis la scène nationale de Sète, celle de Narbonne, la ville de Béziers qui n’est pas en reste, Pézenas, Carcassonne… et tant d’autres.

Pour illustrer cette dynamique régionale, à la veille du 23e festival de jazz qui se déroule à Perpignan (25 septembre-16 octobre 2011) nous avons rencontré Yann Causse, qui en est l’initiateur et le dirige depuis le début. Non pas tant, cette fois, pour parler du festival que pour évoquer l’association qu’il préside aussi : « Jazz en L’R » (« L’R » pour Languedoc-Roussillon, on l’aura compris).
Si l’actualité de Jazz en L’R est au cœur de « Jazzèbre » (c’est le nom du festival, sans doute pour marquer son audace car les zèbres sont toujours de drôles d’animaux) c’est que le second accueillera deux concerts directement issus de la première… Et pas n’importe lesquels : le percussionniste Denis Fournier avec les chanteuses Renata Roagna et Pascale Labbé sous le beau titre de « Paysage de fantaisie » (le 7 octobre 2011 au Théâtre municipal de Perpignan) après une résidence grâce à l’association. Puis le concert du pianiste René Bottlang avec Rémi Charmasson (guitare, basse) et David Caulet (saxophones) qui, lui, fut précédé d’une résidence à Junas (Gard) et aura lieu le 13 octobre 2011 au Théâtre de l’Archipel en première partie du quintet de Stefano Di Battista.

« Jazz en L’R », qui a vu le jour il y a un peu plus de six ans, s’attache, comme on le voit avec ces deux exemples, à développer le jazz en région, à faire en sorte que des musiciens qui vivent « chez eux » puissent y créer, y inventer, laisser leur créativité s’y exprimer, mais aussi y être programmés. Bien évidemment, ils le sont également ailleurs - grâce à des contacts et des partenariats noués avec d’autres associations.
Les « résidences » se déroulent sur un minimum de dix jours et débouchent sur un minimum de trois concerts. Jazz en L’R assure une vraie « promotion » du jazz par sa programmation à l’année mais surtout grâce au festival, où se côtoient activités festives (pique-niques, balades en vélo ou en train touristique, dégustation de vins…), concerts dans toutes les Pyrénées-Orientales, découvertes musicales, prestations de musiciens internationaux… Sans le dire mais en le faisant !
Car on a là un exemple concret des actions qui permettent à la musique et au jazz en particulier de vivre pleinement, sans être trop contraints par les seuls objectifs financiers. Ainsi Jazz en L’R réunit à ce jour Jazz à Junas, la Scène nationale de Sète et Jazzèbre, mais aussi la programmation de l’Université Paul-Valéry à Montpellier, le Domaine du jazz qui officie à Béziers et Pézenas, des musiciens comme Denis Badault, Denis Fournier, Serge Casero, le collectif Koa et bien d’autres, musiciens ou acteurs à des titres divers de la vie du jazz.
C’est aussi grâce à des partenaires particulièrement impliqués que Jazz en L’R réussit son pari, en particulier la DRAC, la Région et l’association « Réseau en scène » qui a, quant à elle, pour vocation la coordination et la diffusion de tous les arts du spectacle. C’est aussi cette union, ce travail proprement collectif qui permet à Jazz en L’R d’entretenir ses ambitions en matière de formation des jeunes ou de sensibilisation de nouveaux publics.

Si la musique vit d’abord par elle-même, par l’inventivité et le talent des musiciens, elle existe aussi grâce au travail de ceux qui s’impliquent dans les rencontres entre artistes et public. Des rencontres « au plus près » qui lui leur permettent de s’apprécier encore plus.