Chronique

Miguel ’Anga’ Diaz

Echu Mingua

Miguel ’Anga’ Diaz (congas), Rubén Gonzalez (p), Cachaito Lopez (b), Malik Mezzadri (fl), Baba Sissoko (voc, n’goni), Roberto Fonseca (p), Dee Nasty (platines), Chucho Valdès (p)… et plus de quarante autres musiciens

Label / Distribution : World Circuit / Night & Day

On avait déjà repéré le percussionniste Miguel ’Anga’ Diaz au sein de Irakéré, des Afro Cuban All Stars ou aux côtés de Steve Coleman ou Roy Hargrove. En duo avec son compatriote Omar Sosa, ce n’était plus simplement la parfaite maîtrise de ses cinq
congas qui impressionnait, mais aussi le goût partagé avec ce pianiste fantasque pour le métissage de la musique et des cultures. Cette ouverture d’esprit, ce sens de l’exploration et du mélange ainsi qu’une fascinante capacité à repousser les frontières émanent donc de Echu
Mingua
, son premier disque en tant que leader. Un disque profondément humain, vivant, dont chaque morceau est une surprise. Et celle-ci a plusieurs visages : elle peut prendre la forme d’une étrange sensation d’inconnu naissant au sein d’un monde familier, comme une
guitare africaine (le n’goni de Baba Sissoko) au milieu d’un danzon des plus typiques qui est aussi l’émouvante occasion d’entendre une dernière fois le piano de Rubén Gonzalez.

Mais l’étonnement est également éclatant dans d’autres morceaux de conception plus inédite : un « Round Midnight » où Diaz utilise un ensemble de sept congas pour s’extraire de son rôle purement rythmique et exposer aux percussions la mélodie du célèbre thème de Monk. Un « Love Supreme » où se combinent à la perfection les congas, les tambours bata, les sections de cordes et les effets sonores du DJ Dee Nasty, procurant à l’ensemble une insolente modernité. Une alliance audacieuse entre musique argentine et cubaine par le biais des percussions africaines et cubaines, dans « Oda Maritima ».

Outre ce type de pièces, très construites et expérimentales, Diaz ne nous laisse pas oublier que la musique est également issue de la plus désarmante simplicité : en moins d’une minute, dans « Jerry’s Tune », le dynamisme des percussions est à nouveau démontré à travers le mariage éphémère des congas, du cajòn flamenco et de la buleria. Deux autres titres sont le résultat de jam sessions peu structurées, très improvisées : « Freeform » le bien nommé, où, sous la houlette de Dee Nasty, se croisent et s’interpellent la flûte de Magic Malik, les congas de Diaz et les tambours bata, et « Dracula Simon » où, cette fois, le ménage à trois est constitué de l’infatigable Malik, de Diaz et du contrebassiste Cachaito Lopez. Enfin, comment résister au plaisir de retrouver des amis chers lorsque les routes ont bifurqué ? Le
temps d’un unique morceau de Chucho Valdès, « Conga Carnaval », Diaz rejoint Irakéré et c’est un déferlement irrésistible d’énergie, de joie, de congas et de riffs de cuivre.

Echu Mingua rassemble tout ce que l’on peut attendre d’un grand musicien : une incroyable technique, un vrai répertoire et un grand sens de l’écriture et de l’arrangement, une soif de mélange et d’ouverture, une indéniable intelligence dans le choix des compagnons de
voyage. Une totale réussite.