Chronique

Mountain Men

Against The Wind

Mr Mat (g, voc) , Barefoot Iano (hca)

Label / Distribution : ECHO Productions

Mr Mat, c’est le Frenchie à gueule de boxeur. L’autre, l’Australien sans souliers avec son harmonica, c’est Barefoot Iano. Moutain Men existe depuis maintenant six ans. Deux albums studio, deux albums live dont un de reprises de Brassens, et celui-ci, Against The Wind. Leur dégaine ne laisse pas indifférent, et on se demande forcément ce qui va sortir de leurs instruments, de leurs cordes vocales, de leurs tripes…

La voix de Mr Mat s’approche de celle de Tom Waits ; elle est grave, rocailleuse à souhait et remplie jusqu’au goulot de l’histoire du blues. En y ajoutant le son métallique de sa guitare, un peu de picking et l’harmonica de Iano, on obtient une mixture pétrie de ce même blues, mais aussi de folk et de rock. « Spoonfeld » électrise le tout : harmonica distordu, guitares hurlantes, batterie puissante… et la voix du chanteur qui descend puiser ses éraillements au fond de ses bronches. Il y a tout de même la douceur d’un pont piano-voix presque chuchoté qui ne trompe personne : c’est le calme entre deux orages.

La recette spéciale de Mountain Men, c’est la reprise inattendue judicieusement placée dans le bouillonnement brûlant de leur répertoire original, reprise qui vous hérisse le poil par sa singularité. Sur leur premier album, Spring Time Coming, ils nous avaient déjà fait le coup avec « Les Marquises » de Brel ; puis deux ans plus tard, sur Hope, c’était « Smells Like Teen Spirit » de Nirvana. Deux réussites. Cette fois, c’est au tour de Ray Charles avec « Georgia On My Mind ». Comme par le passé, on est surpris par ce choix, et c’est peut-être ce qui fait autant de bien. Mr Mat, habité par cette musique, la pousse dans ses derniers retranchements, jusqu’à emprunter quelques accents à Janis Joplin pour ponctuer le morceau. C’est une chanson qu’on connaît depuis toujours, mais ici, c’est la première fois qu’on l’entend. Et cette voix hargneuse, viscérale, a beau projeter la mélodie avec toute sa force ; on dirait qu’elle nous la murmure au creux de l’oreille.

A ce stade, on n’est qu’au milieu de l’album, et il reste encore des titres autrement surprenants comme « Gonna Waltz », une balade apaisante où un piano pointe le bout de son clavier tandis qu’une choriste vient lover sa voix au creux de celle du guitariste. Il y a même des textes en français, juste pour rappeler que tout peut sonner au sommet de cette montagne-là.