Scènes

Pierre Schaeffer - Archéologie future

Du 24 au 26 novembre 2010 à la Maison des Pratiques Artistique Amateurs


Encastrée derrière de hautes grilles dans le Marché Saint-Germain à Paris se trouve la Maison des Pratiques artistiques amateurs. C’est ici que se déroulent les premières manifestations à la mémoire de Pierre Schaeffer sous le double prétexte du centenaire de sa naissance et du cinquantenaire de son Service de la Recherche au sein de feu l’ORTF.

Avant l’événement lui-même, ce mardi 23 novembre 2010 est l’occasion d’une rapide présentation. On flâne le temps qu’arrivent les responsables culturels indispensables à toute inauguration digne de ce nom. Devant l’entrée de l’auditorium, une série de photographies accompagnée d’extraits de textes. Ici n’ont pas été gommée les cigarettes fréquemment collées aux lèvres du maître. On se dit aussi qu’il faudrait relire Pierre Schaeffer – le romancier comme l’essayiste – tant est charmant ce ton primesautier bien qu’épris de rigueur.

L’auditorium s’ouvre. Longues minutes de discours et remerciements ponctués de mols applaudissement. Puis le bref plaisir d’entendre la voix de Schaeffer, extraite de l’une de ses nombreuses conférences explicatives. L’écran s’éclaire sur un épisode des Shadocks, un autre sur les bébés du célébré.

Sonne l’heure du cocktail. L’assemblée fait tinter ses flûtes dans le préau d’accueil. La voix avinée d’un clochard braillant ad libitum « Yellow Submarine » passe à travers les grilles et couvre par instants la rumeur mondaine. Beaucoup d’invités semblent se connaître. « Tout le mode se retrouve, ce soir », dit une dame.
Ici, François Bayle est interrompu dans sa conversation par une caméra. « Pourriez-vous, cher monsieur Bayle, nous improviser un objet sonore ? »

19h30, nous devons remonter vers l’auditorium. Quelques amplis noirs et massifs face à la scène, martialement disposés comme les pièces d’un Kriegspiel. D’autres, ronds et rouges, perchés çà et là jusque dans les travées. Le principe de la spatialisation cinétique se voit avant de s’entendre.

Cette deuxième session débute par un panaché de brefs extraits d’œuvres du GRM. Eclats de la Divine comédie de Bayle, du Pop à l’âme de Parmegiani, de l’Orphée de Schaeffer, sa pièce la plus ambitieuse - huée en 53, et de son Bidule en ut, pièce datant d’avant les bandes magnétiques, quand le travail se faisait avec des disques de cire. Ceux-ci et d’autres ramassés en un quart d’heure aussi alléchant que frustrant.

Sonne l’heure de la dernière séquence. Une merveille de reportage, libre de forme mais lisible. Souvenir d’une époque ou la télévision ne s’uniformisait pas encore à copier indéfiniment le succès. On y voit Schaeffer revenir sur les terres nancéennes de son enfance. Y sont évoquées ses deux grands-mères, une splendide demeure en style art nouveau et, surtout, la parole de ce théoricien vif et conteur malicieux. Il faudrait décidément relire Pierre Schaeffer.

Fin de l’amuse-bouche au goût de trop peu. C’est aujourd’hui que la manifestation commence vraiment. Allez-y, ce serait misère que n’y assistent que ceux qui s’y retrouvent encore et toujours.

par Aymeric Morillon // Publié le 23 novembre 2010
P.-S. :

D’autres concerts organisés par le GRM et liés à ces dates anniversaires seront programmés entre janvier et septembre 2011. Vivement l’année prochaine.