Chronique

Arnaud Le Meur, Hervé Duret, Nicolas Iarossi

Blanc

Hervé Duret (g, effets, loops), Nicolas Larossi (voc, cello, loops), Arnaud Le Meur (d, effets)

Label / Distribution : Autoproduction

Est-ce un album de musique ou un recueil de poésie ? La question est loin d’être négligeable car, sur les six pistes de Blanc, Nicolas Iarossi récite des poèmes qui, à l’exclusion de « Je voudrais pas crever » de Boris Vian, sont tous de la plume de Pierre Soletti. Lui se définit comme un « poète agité » et n’essayez même pas de chercher quelques éléments de sa biographie, vous ne glaneriez rien. Il passe entre les mailles. Peut-être est-ce cette démarche résistante qui a séduit les trois musiciens ? Quoi qu’il en soit, on ne peut pas dire que ces Montpelliérains ont mis ces textes en musique. Car poésie et musique ne cohabitent pas ici. Elles se nourrissent l’une l’autre. Ainsi, dans « Je dirai que j’ai raté le train », la musique déambule au gré d’un motif obsessionnel que décline Arnaud Le Meur à la batterie tandis que la guitare arachnéenne d’Hervé Duret est pleine d’une réverbération sans fin et que le violoncelle se montre gracile et cristallin. Les vers « A quoi bon galoper trop ? Comme si au bout il n’y avait pas de bout » complètent ce tableau d’une quête sans objectif. Album métaphysique donc ? Vraisemblablement, et la chute du poème de Vian - « Je voudrais pas crever / Avant d’avoir goûté / La saveur de la mort » - en témoigne.

Reste qu’au-delà ou en-deçà du lien qu’on peut faire entre textes et musique, l’album est poignant. Derrière les mots et les sons, on saisit une ode à la souffrance. Pourtant tout se termine avec une chanson en trois temps, presque guillerette et volontairement confuse, qui donne à la petite poésie « qui pue, [qui] sent des pieds [et qui] fait des pets » une rieuse touche d’humanité.