Chronique

Bill Dixon

Papyrus, Vol. II

Bill Dixon (t, p), Tony Oxley (d, perc)

Label / Distribution : Soul Note

Ce CD, sorti en 1999, est le deuxième volume d’un travail en duo avec le batteur anglais Tony Oxley. Rappelons que Bill Dixon (né en 1925) est une figure historique du « free jazz », étant l’organisateur du festival « October Revolution » à New York en 1964 qui a été un moment marquant du mouvement. Il a aussi joué avec Cecil Taylor et Archie Shepp, entre autres. Professeur de « musique noire » à Bennington College dans le Vermont depuis belle lurette, Dixon se soucit plus de son travail d’enseignant que de sa carrière sur les scènes et dans les studios d’enregistrement. Comme la musique d’un autre universitaire, Anthony Braxton, à laquelle elle ressemble peu, celle de Dixon est donc complètement hors mode.

Ce n’est pas du jazz, insiste-t-il. Si vous voulez. Je serais tenté de ranger cette musique intime, lyrique et improvisée, qui s’approche parfois du bruitisme mais garde tout de même le sens du « story-telling », aux limites de cette tradition, tant le son et le phrasé de trompette évoque plus le jazz qu’autre chose.

Oxley reste discret, proposant des petites remarques, des couleurs de cymbales riches d’harmoniques, ou bien conversant avec le trompettiste avec des sons légers, secs. L’attention se porte plutôt sur le travail de trompette. Dixon est au plus près du son, ne jouant jamais très fort, préférant laisser venir et s’établir la note sur le souffle. Il explore souvent une registre grave où on a moins des notes que des bruits, des sons d’airs sculptés par l’embouchure et colorés par l’instrument. L’atmosphère est concentrée et sereine, ce qui fait la force de la musique mais définit également ses limites : on ne s’éclate pas, on se retient pour mieux goûter la beauté indéniable de ces expressions poétiques.

Parmi les moments forts, citons le superbe « Four : VI : 1998 », où Dixon s’est ré-enregistré pour converser avec lui-même, faisant donc un trio avec Oxley, et « Crawlspace », peut-être le morceau le plus mélodieux, et où les deux musiciens font le plus ressortir l’idée de dialogue. Une musique belle et originale.