Chronique

Diego El Cigala

Indestructible

Label / Distribution : Sony music

C’est chaque fois avec le même étonnement qu’on écoute un album du chanteur Diego El Cigala. Non qu’on trouverait incongru d’entendre sa voix, si marquée de flamenco andalou, s’envelopper ainsi de musique latine — elles ont tout de même une langue et « quelques » bouts d’histoire en commun — mais plutôt surpris de réaliser soudain à quel point tout ceci semble « naturel » : signe qu’entre les deux branches musicales, il n’y a plus simplement hybridation, métissage ou je ne sais quelle autre forme de synthèse, mais unité bien réelle, invention, peut-être, d’un nouveau genre musical.

Le chanteur gitan, natif de Madrid mais chantant l’Andalousie, n’est pas, bien sûr, le premier à mettre ainsi en résonance l’Espagne et Cuba — d’autres plus informés en parleraient mieux que moi —, mais son tour de force, marqué par la réussite de son album Lágrimas Negras (2004) enregistré avec le pianiste cubain Bebo Valdés, reste d’avoir rendu cette association parfaitement évidente.

Et c’est toujours la même impression que l’on retrouve avec ce nouvel album truffé de grands classiques de salsa, des standards signés entre autres par Ray Barretto ou Cheo Feliciano. Pour réaliser ce disque, le chanteur a littéralement marqué sur la carte les différents axes et points de repère de son univers musical. Depuis la République Dominicaine où il vit, et jusqu’à Barcelone, ce haut lieu espagnol de la salsa, il est passé par la Colombie, Porto Rico, Miami, New York, et Cuba bien sûr, y rencontrant chaque fois les musiciens (Gonzalo Rubalcaba, Larry Harlow, Oscar D’León, Los Muñequitos de Matanzas…) capables d’interpréter avec lui cette musique comme si elle avait été faite pour lui.

En définitive, cet album célébrant cette fusion improbable de jazz, de soul, de son, de mambo, etc., d’où est sorti la salsa — cette musique encore aujourd’hui si vivante et si charnelle —, démontre et affirme qu’il en sera peut-être pareil pour lui : Indestructible au moins pour un bon bout de temps.