Tribune

Django Reinhardt, superstar !

Tout l’intérêt d’une célébration, comme celle du centenaire de la naissance de Django Reinhardt (1910-1953), réside dans le déchainement des passions qu’elle suscite.


Tout l’intérêt d’une célébration, comme celle du centenaire de la naissance de Django Reinhardt (1910-1953), réside dans le déchainement des passions qu’elle suscite.

Quel bonheur de pouvoir enfin parler d’un artiste qu’on connaît. « On » connaît Django Reinhardt. Son nom évoque au moins les cérémonies annuelles de remise de prix dans le milieu du jazz (Prix Django Reinhardt de l’Académie du jazz, Django d’Or). Son nom claque en bouche comme l’onomatopée magique qui protègerait du mauvais œil. « On » connaît Django, ce guitariste légendaire, son style de musique unique (au point qu’il en est resté inaltérable, et peine à évoluer aujourd’hui), sa main mutilée (« on » s’extasiera sur l’exploit), ses cavales fantasques, sa caravane, sa descendance héritière, gardienne du temple.

Le phénomène dépasse donc largement le cercle des amateurs (chevronnés ou non) de jazz. Nous sommes dans le spectacle. Nous payons la redevance, voici le retour sur investissement. A qui le tour ?
Qui saura mieux que son voisin expliquer son amour inconditionnel pour « le plus grand guitariste de jazz manouche », pour « Django, divin manouche », pour ce « Tsigane aux doigts d’or » ?

Comment célébrer au mieux le génie d’un personnage aussi important, fierté de notre identité nationale, chantre du jazz français ? D’ailleurs « de nombreux artistes s’en sont inspirés tels que Thomas Dutronc, San Severino ou Matthieu Chedid » [sic], artistes qui, bien sûr, s’organisent pour dresser un autel à la gloire du guitariste lors d’une soirée spéciale. On y apprend que « Thomas Dutronc et Sanseverino, deux des plus illustres artisans de la vulgarisation de la musique manouche et de son offrande au plus large public » [sic] seront aux premières loges.

Qu’on se rassure, il y aura une plaque de rue. En effet, après avoir donné à un carrefour le nom de Place Louis Armstrong, la Mairie de Paris offre le plateau des Puces, dans le XVIIIè arrondissement, à la postérité du musicien. Place Django Reinhardt, la classe…

Il a fallu cent ans pour passer de Django Reinhardt à San Severino, c’est plus facile à épeler.
La question qui me taraude est la suivante : après le cinquantenaire de Boris Vian, l’hommage à Miles Davis et le centenaire de Django, qu’avons nous en stock pour l’année prochaine ?
Quel sera le musicien de jazz dont « on » parlera ?
Voyons voir…
Il y aura bien le centenaire des naissances de Roy Eldridge, Jo Jones ou Stan Kenton…
Qui ça ?