Maritie et Gilbert Carpentier. Les longues soirées du samedi avec Guy Lux ou Michel Drucker. Le grand escalier. L’orchestre. Les nœuds pap’, les smokings blancs et les robes à paillettes… Vous vous souvenez ?
En écoutant Cantopiano, on pourrait penser que Giovanni Mirabassi a, lui aussi, passé des samedis soirs comme ceux-là devant la télé.
Les standards qu’il propose ici sont tirés du répertoire des chansons populaires françaises. Elles sont égrenées, déballées, effeuillées avec délicatesse, amour et tendresse par le pianiste qui, seul face au clavier, il nous fait chanter à nouveau sur « Il venait d’avoir dix-huit ans », « Dis, quand reviendras-tu ? » ou « Si tu me payes un verre », et vibrer sur le sombre « Manon » ou le sensible « Cécile ». Puis, avec lyrisme, il réveille la nostalgie du « Chaland qui passe ».
Mirabassi n’oublie cependant pas de rendre aussi hommage à quelques-uns des chanteurs actuels. Pas les stars du prime-time, mais plutôt ceux qui ont gardé une certaine élégance du verbe et de la mélodie. Ainsi, on valse sur « C’que t’es belle » d’Alexis HK, on s’abandonne sur « Sans titre » de Jeanne Cherhal, on s’évade avec « La fleur du large » d’Agnès Bihl…
Moins brûlant qu’Avanti, qui reprenait les chants révolutionnaires, Cantopiano n’en n’est pas moins fort et évocateur. Le pianiste parvient toujours à mettre en valeur la mélodie ou le refrain dans des interprétations souvent courtes, sans bavardage inutile, et sans jamais tomber dans la mièvrerie. Au contraire, il en sublime chaque instant. En quelques notes, il impose son style, sa « voix » à la fois si personnelle et si difficile à qualifier, où la délicatesse du toucher, la franchise des attaques et la virtuosité du phrasé augmentent l’émotion avec justesse.
Mirabassi joue donc de « nouveaux » standards et offre un jazz populaire, brillant et sensible. Quoi de plus agréable ? Cantopiano se déguste avec plaisir, gourmandise et nostalgie. Tout comme les gâteaux de nos dimanches envolés.