Chronique

Joachim Florent

After Science

Joachim Florent (b, elec, fx)

Label / Distribution : Coax Records

Après Fanny Lasfargues, Joachim Florent est le second contrebassiste du Coax Collectif a se livrer à l’exercice si particulier du solo. Le quatrième solo de la bande, si l’on ajoute le Phoque éventré de Yann Joussein et Acapulco de Julien Desprez. Un mode d’expression en passe de devenir un signe de ralliement, qui approche l’instrument avec la même envie d’en exploser les formes et les timbres, de le faire muter, de lui remuer les entrailles à grandes charges électroniques. Le contrebassiste de Radiation 10 et de Jean-Louis n’échappe pas à la règle, et dans « Second Life » les pizzicati bouclés et pleins d’effets dessinent un ballet singulier qui nous perd dans des mondes parallèles. C’est une contrebasse, bien sûr, mais que pourrait-elle être d’autre ? Un orgue rétro-futuriste dans le justement nommé « Bass The Unknown » ? Un modèle réduit, presque violoncelle tombé d’un rêve de Bach dans l’écho naturel de la collégiale Saint-Pierre Le Cour au Mans (« Bayssan Chapel »)  ? Tout ceci à la fois.

Contrairement à Lasfargues et à ses compagnons solistes, Joachim Florent ne se précipite pas au devant du chaos et de la sculpture patiente de la masse électrique. Bien sûr, « High Speed Monolith » est un bourdon ardent où l’archet file comme une comète pour s’échouer sur une quelconque planète hostile, mais Florent prend soin d’y laisser quelque empreinte charnelle. Là où les collègues de Coax concevaient leur solo comme une fusion avec l’instrument-machine devenu prolongement, voire augmentation du musicien, il conserve une distance et garde une forme de contrôle, à l’image de « Surrealism Off Me » où l’on a le sentiment que l’archet flotte sur des nappes épaisses, comme on laisse des pas dans la neige.

D’autres traces, d’autres transes occupent ce très court album - il dépasse à peine la demi-heure -, ce qui le pare d’un certain mysticisme. Ça débute avec ce « Muezzin Call » qui sature l’espace d’un archet grondant, mais on le retrouve également dans le magnifique « Arvo » où la culture classique de Florent, évidente dans la moindre de ses facettes, éclate au grand jour. Un disque abouti et très étrange qui révèle une véritable personnalité de cette nouvelle génération, décidément dorée.