Chronique

Josephine Davies

Satori

Josephine Davies (ts, ss), Dave Whitford (b), Paul Clarvis (dms)

Label / Distribution : Whirlwind

Pour les bouddhistes, le Satori est l’état d’éveil, de conscience. Lorsque la Britannique Josephine Davies trace nerveusement des lignes franches dans « The Tempest Prognosticator », l’auditeur prend effectivement conscience de découvrir là une jeune instrumentiste fort prometteuse. Jouant avant tout à l’essentiel, sans effets inutiles, elle laisse ainsi beaucoup de place à ses compagnons de trio, tout en assumant une direction qui ne souffre aucune contestation. Le contrebassiste Dave Whitford, aperçu aux côtés de Liam Noble et le chevronné percussionniste Paul Clarvis, célèbre pour sa participation à de nombreuses musiques de films, sont entièrement au service de la saxophoniste, quand bien même dans un morceau tel « Paradoxy », c’est la rugosité de la basse rythmique qui instille une dose d’urgence hérissée de groove dans un propos très maîtrisé.

Pour son premier album en trio, Josephine Davies semble déjà rompue à l’exercice. On a le sentiment, dans la douceur sans mièvrerie de « Something Small » qu’elle profite de chaque temps pour gagner en maturité. Elle n’est pourtant pas sortie de nulle part. Outre cet orchestre et un quintet fougueux et brouillon, elle tient le pupitre du ténor dans le London Jazz Orchestra pour lequel elle compose également. Même si elle utilise aussi le soprano, son jeu au cordeau sied mieux à cet instrument. Il y brille parfois quelques doux reflets ayleriens, comme apaisés.

Enregistré lors de deux concerts dans un club londonien à trois mois de différence, Satori est aussi le symbole d’une maturation, d’un équipage de musiciens qui trouvent peu à peu une certaine connivence et in fine un langage commun. C’est d’autant plus sensible que les prises sont alternées. On constate une certaine pugnacité dans les concerts de juin 2016 (« Snakes »). Quant aux titres plus récents, ils ont davantage de nuances, à l’instar du sybillin « Crisp Otter ». Au delà du jeu de mots, il constitue un hommage mal déguisé à l’un de ses principaux modèles. Satori ne cherche pas à renverser la table. C’est un travail mené avec intelligence et pondération. Davies, un nom à garder en mémoire.