Scènes

LOOPS au Théâtre Al Gomhoria

Eric Prost (ts), François Gallix (cb), Stéphane Foucher (d)- Théâtre Al Gomhoria, Le Caire, 10 décembre 2003.


Dans le cadre du festival de jazz Scènes de Jazz organisé par le Centre Français de Culture et de Coopération du Caire, le trio LOOPS s’est produit au club After Eight et au Théâtre Al Gomhoria, où nous sommes allés l’écouter.

On entre dans le vif du sujet dès le premier morceau, Blues Loops, une composition d’Eric Prost qui donne le ton du concert : un trio très acoustique dans lequel les trois musiciens jouent des rôles d’égale importance. Et ce, malgré le fait que François Gallix joue de la basse électrique, car il n’a malheureusement pas pu transporter sa contrebasse pour cette tournée.


Alternent ensuite des compositions de John Coltrane - Satellite, Lazy Bird - et des morceaux écrits par les musiciens du trio. Chaque thème est abordé dans un style qui navigue entre le hard-bop et l’avant-garde avec l’idée récurrente d’évoquer une spirale musicale. Cette approche rappelle évidemment John Coltrane qui est une référence constante de LOOPS, mais Eric Prost a su dépasser l’héritage de Trane et se créer une voie personnelle.

Les trois musiciens se complètent à merveille et arrivent incontestablement à générer une tension dans les morceaux rapides comme Get High, écrit par Eric Prost et titre du premier album enregistré par LOOPS, ou Fée, thème très « monkien » que l’on doit à Stéphane Foucher.

Les thèmes plus calmes donnent l’occasion d’apprécier la musicalité de François Gallix à la basse, comme dans Place du Roulin, la finesse d’Eric Prost, dans la deuxième partie du triptyque A la santé du feu, et celle de Stéphane Foucher aux mailloches dans Muse de la danse, thème écrit par François Gallix.

Certains morceaux ont également une influence rock en toile de fonds à l’image de la troisième partie, très dansante, du triptyque A la santé du feu ou encore L’ode tourbillonnante, thème jazz disco - ou disco jazz, comme le fait remarquer Eric Prost - interprété sur une métrique à cinq temps qui allége singulièrement le rythme binaire.

LOOPS - © Vincent Delorme
François Gallix (b), Eric Prost (st), Stéphane Foucher (d).

Sur Muse de la danse, LOOPS a invité un joueur d’oud, Ahmed. C’est donc à l’oud, accompagné de la basse et de la batterie, que revient l’honneur d’introduire le thème. L’oud a une sonorité magnifique, mais, malgré sa virtuosité, le joueur n’a pas un phrasé jazz, et quand le saxophone intervient, l’oud disparaît dans la masse sonore sans avoir apporté une réelle valeur ajoutée.

Changement de décors et d’époque avec In a Sentimental Mood et l’arrivée surprise de Francis Lockwood au piano. L’introduction du thème nous révèle un pianiste qui joue dans une veine plutôt lyrique. LOOPS s’est adapté à la nouvelle donne et le jeu plus classique n’en permet pas moins une belle montée en puissance sur ce thème de Duke Ellington.

Pour clore le concert, c’est au tour de Francis Lockwood de s’aventurer dans le répertoire de prédilection de LOOPS : Coltrane. Le quartet déroule une magnifique interprétation de Lazy Bird et le morceau s’achève sur un jeu de passe-passe entre les quatre musiciens, classique, mais bien en place et jubilatoire.

Un excellent concert avec un trio qui réussit le difficile pari de suivre la trace de Coltrane tout en développant un langage assez personnel. LOOPS mérite le détour et, avec un soupçon de réglages sur l’équilibre sonore, le trio will get very high !