Scènes

Le Rhino Jazz toujours plus nomade

Pour sa 31è édition, le festival 2009 ne renie rien mais se promène près d’un mois entre Lyon, Saint-Chamond et Saint-Etienne.


Pour sa 31ème édition, l’ex-festival de jazz de Rive-de-Gier 2009 ne renie rien de ses préférences mais se promène toujours un peu plus, pendant près d’un mois, entre Lyon, Saint-Chamond et Saint-Etienne.

Cette fois, c’est bien terminé. Le « Rhino » a définitivement coupé les ponts avec Rive-de-Gier, écrin géniteur, en 1979, de ce festival hors sentiers battus et au fumet largement libertaire.

L’histoire serait trop longue à conter du divorce progressif entre cette commune en mutation et cet événement musical qui, au début, surtout, lui faisait oublier qui elle était. Résultat : même s’il migre à Saint-Chamond, y installe ses pénates et y organise quatre de ses principales soirées, le festival est devenu largement « SDF », jouant à saute-communes sans limites de départements, de « bassins de vie », de lieux de concerts ou de style de musiques. De Rive-de-Gier, il ne reste plus qu’un concert rikiki, entrée libre, donné à l’hôpital Pays du Gier (Smoky Joe Combo, 22/10, à 19h). Par la suite, le Rhino se posera successivement à Caluire (4 concerts), Villeurbanne, l’amphi de l’Opéra de Lyon, et jusqu’à Saint-Etienne (5 concerts), au gré des coproductions ou des partenariats noués avec les salles de spectacle, les associations ou les communes concernées.

Tout un symbole : cela a démarré à Lyon les 2 et 3 octobre par deux concerts donnés sur la Plate-Forme et à l’Amphi-Jazz de l’Opéra. A l’opposé, durant les week-ends des 16, 17 et 18 et des 22, 23 et 24, il irriguait, pratiquement en simultané, 17 communes différentes de la Loire. D’où un festival évidemment éclectique, centré (sauf la soirée blues) sur des musiques européennes, marqué par plusieurs retours (les Puppini Sisters, Jean-Charles Richard, Sclavis-Portal, Pino Minafra), escortés de quelques inédits : le Jan Vanek quartet, le duo Sissoko/Segal, Sandra Nkaké, le duo Fred Lewin - Rachel Ratsizafy + Esaïe Cid

Fidèle à ses dates, fidèle à ses choix, le Rhino délaisse ainsi toute tête d’affiche, groupe reconnu ou tournée américaine de renom. Certes, comme le rappelle Jean-Paul Chazalon, lorsque le festival programmait Art Blakey, Dave Liebman ou Michel Petrucciani, ceux-ci étaient encore, pour une large part, inconnus du grand public. Pour autant, l’absence totale d’une formation de jazz de renom, à l’exception du duo Sclavis-Portal (le 19) ne pouvait qu’intriguer.

A l’inverse, le Rhino se voulait d’abord didactique - via un hommage à Art Blakey, rendu par Christophe Metra Quintet - puis historique, via une série « Il était une fois le jazz », démarrant avec le New Orleans évoqué par Fred Dupin & The new Bumpers. Enfin, le Rhino plongeait à pieds joints dans le blues : aux côtés de Bob Brozman et de Deborah Coleman, réapparaissait le temps d’une conférence au sommet, Route 69, avec Jack Bon et (tiens, tiens) Robert Lapassade himself.

Changement d’âme ? Peut-être pas. Année de transition, sans doute, même si le Rhino faisait une belle place (le 15 à Saint-Etienne) au regretté Maurice Merle, « Ripagérien » de la première heure. Mais pour se convaincre que le Rhino conserve bien le cap, il aura fallu retrouver Pino Minafra et ce « Terronia » donné à Saint-Etienne, ce cataclysme de cuivres et de voix qui, en sautant les Alpes, s’est doté d’encore plus de force déjantée.