Scènes

Louis Winsberg au coeur de Marseille


Entre jazz et flamenco à la Cité de la Musique (Marseille). 10 octobre 2011.
Nous avons déjà exposé ici tout le bien que nous pensions du Marseille Marseille de Louis Winsberg. Ce soir le guitariste et sa tribu, ses « cousins » comme il dit, jouent leur répertoire au coeur de la ville en question, à la Cité de la Musique.

Le disque se caractérise par un savant mélange de jazz, de flamenco, de fusion, d’électronique, et d’orient. Tout cela se retrouve sur scène en plus intense. Les morceaux sont plus étirés, les styles musicaux poussés un peu plus loin dans leurs retranchements. Les improvisations, plus libres, s’éloignent puis reviennent, les mélodies sont davantage suggérées – notamment l’introduction de « La Marseillaise » en duo entre Winsberg et le guitariste flamenco Antonio El Titi.

Mais par-dessus tout, le concert apporte la dimension visuelle manquante à travers l’art de Manuel Gutierrez, qui n’exécute pas de réelle chorégraphie à proprement parler mais improvise et incarne sur scène toute la vitalité explosive de la danse flamenca. D’abord immobile, comme pour s’imprégner de la musique, droit et tendu à l’extrême, il se lance subitement dans de rapides et puissantes zapateadas qui contrastent singulièrement avec la précision et la lenteur des gestes de ses bras et mains. Quand il ne danse pas, il encourage au cajón le reste du groupe par les jaleos typiques du flamenco, les palmas et autres « olé » et « vamos » afin de maintenir un certain niveau d’intensité musicale, dans la grande tradition.

L. Winsberg © H. Collon/Objectif Jazz

Lorsque l’énergie est à son comble, Winsberg prend le pari de renvoyer ses musiciens en coulisses le temps d’un duo guitare-voix avec Mona, le superbe traditionnel arabo-andalou « Makountou ». La voix de Mona dégage alors une force émotionnelle rarement égalée, dans une interprétation très rubato et déstructurée que seul un duo permet. Mais la chair de poule et les larmes aux yeux, ça ne doit durer qu’un temps ; le reste de la tribu revient au galop et la fête reprend de plus belle, pour s’achever par un rappel - une version reggae (!) du « Méditerranée » de Tino Rossi -, puis par un autre, pour lequel on ira chercher dans la salle un chanteur gitan pour un bœuf endiablé.

Le disque Marseille Marseille était déjà excellent en soi ; et le public sous le charme ne s’attendait sans doute pas à ce que le concert le surpasse à ce point. Standing ovation finale. Quand on gagne l’affection des Marseillais…