Chronique

Mario Canonge, Erik Pédurand

Kapital

Mario Canonge (p), Erik Pédurand (voc)

Label / Distribution : Aztec Musique

Après son remarquable album « Zouk Out », qui conférait des lettres de noblesse jazzistique à la plus populaire des musiques antillaises de l’aire francophone, le pianiste Mario Canonge souhaitait déployer un propos plus politique. Avec le poète Erik Pédurand, déjà présent sur ce précédent disque, il a composé un répertoire en forme de manifestes poétiques dénonçant l’accumulation capitaliste telle qu’elle a pu se développer aux Antilles, de l’horreur esclavagiste à l’aliénation coloniale et post-coloniale.
À l’occasion d’une résidence artistique dans une ancienne plantation en Guadeloupe, le vocaliste - résidant désormais à Chicago et nourri des mobilisations Black Lives Matter - et le pianiste, établi à Paris, rôdent leur complicité au-delà de la dénonciation, semblant possédés par la mémoire des souffrances imprégnant les murs des lieux. Entre le jeu instrumental soulful de Canonge, imprégné des musiques insulaires, et l’art vocal de Pédurand qui déclame mais aussi chante et parle, surgissent d’infinies nuances de créolisation. Neuf titres délicatement enragés, avec une pointe d’humour irrévérencieux en guise de défi aux puissants de ce monde. Un pamphlet jazz des plus pertinents.