Chronique

Miles Davis

The Warner Years (1986-1991)

Label / Distribution : Warner Bros.

Rhino France, une division de Warner, est à l’origine de ce coffret regroupant les albums enregistrés par Miles Davis pour le label Warner, dernière maison de disque après Columbia, entre 1986 et 1991, date de la mort du trompettiste.
Dans un coffret vertical au design coloré et soigné, il regroupe les albums Tutu, Amandla et Doo-Bop, ainsi que les bandes sons des films Siesta (1987), Dingo (avec Michel Legrand - 1990) et deux disques posthumes Live Around The World (une compilations de concerts de 1988 à 1991, éditée en 1996) et Live At Montreux (1991), le concert-hommage à la carrière du trompettiste organisé par Quincy Jones. Un cinquième disque propose des enregistrements inédits et des participations de Miles Davis à d’autres projets, enregistrés pendant ces cinq dernières années.

De Tutu tout a été dit, et il figure ici dans son intégralité. Amandla, qui n’en est que le prolongement, moins cliché et plus mélodique que rythmique, fait ici figure de rescapé. Cet album est rarement mis en valeur dans la discographie de Miles Davis, à tort sûrement. Doo-Bop, qu’il n’a pu terminer, est une œuvre unique et surprenante. Qu’avait-il en tête à ce moment-là ? Il avait senti le potentiel universel de la scansion hip-hop, l’impact commercial sans doute aussi. Peut-être préparait-il une nouvelle révolution musicale… Toujours est-il que cette collaboration avec Easy Mo Bee, programmateur et chanteur hip-hop, est, aujourd’hui encore, pleine de promesses inabouties. Terminé après le décès de Miles, bricolé avec ce qu’il avait laissé de séquences en studio, le projet n’en porte pas moins le germe d’une brillante idée : mélanger le jazz aux séquences, aux samples et aux rythmes du hip hop… l’avenir lui a donné raison.

Les bandes-son de Siesta et Dingo raviront les amateurs chevronnés mais ne brillent ni par leur qualité musicale ni par leur cohérence. Simples témoignages, elles n’ont que le mérite d’exister.
Les deux albums d’enregistrements de concert sont par contre de beaux témoignages de l’époque post Tutu, celle du grand retour. Live Around The World surtout, qui propose des thèmes issus de Tutu, Amandla et même In A Silent Way. Le concert de Montreux est un document qui fait entendre Miles Davis accompagné d’un big band et reprend, des années plus tard, les collaborations avec Gil Evans : Miles Ahead, Sketches of Spain et Porgy and Bess. Étonnante performance pour un musicien qui, toute sa vie, s’est refusé à regarder en arrière. C’est l’insistance de Quincy Jones, son ami, qui a eu raison de ses réticences et qui nous permet aujourd’hui d’entendre ces réinterprétations modernisées. Enfin, le dernier disque, composé de raretés et d’inédits, ne retient guère l’attention. Les inédits n’offrent rien d’exceptionnel et les raretés, entendons les participations de Miles Davis aux enregistrements d’autres musiciens, sont un calvaire pour les oreilles.
Ce coffret original, regroupant sept albums du label Warner est donc un bel objet pour collectionneur et un témoignage important de cette dernière période de la vie de Miles Davis, dont on célèbre cette année les vingt ans d’absence.