Chronique

Night Records

Call Up the Spirits of the Dead

Muddy Waters, Mississippi John Hurt, Bukka White, Bea Booze…

Label / Distribution : Night Records

Night Records est un label français, de Metz, qui réédite en vinyle des enregistrements de blues d’avant les années 1950 pour des questions de droits. Night Records est aussi l’un des labels soutenus par le disquaire La Face Cachée, comme Primitiv Sounds ou Replica. Ce sont des personnes qui connaissent la musique et les disques, et qui font ça très sérieusement.

Aussi, Night Records joue sur l’identité du blues - son aspect sombre, celle de la musique du diable - et propose la même esthétique sur tous les disques. Une pochette en noir et blanc avec le visage du.de la musicien.ne en dessin, effet fusain, le dos en noir avec les informations de crédit et toujours la frise mortuaire et le slogan « Call Up the Spirits of the Dead » en lettres gothiques. Les pochettes intérieures, sur le même thème, présentent toujours le dessin d’un Robert Johnson aux pieds de bouc sur une face et une sorte de publicité pour le catalogue sur l’autre. Le slogan ? « To be played at maximum volume ».

Voilà pour la forme.
Sur le fond, la collection s’enrichit très régulièrement de nouveautés, dont les 4 dernières en date, avec Muddy Waters, Mississippi John Hurt, Bukka White et Bea Booze.
L’esthétique est large.

De Muddy Waters (1913-1983), on peut entendre des enregistrements étalés entre 1941 (seul à la guitare acoustique) et 1950 entouré d’un petit combo où il est passé à la guitare électrique. On perçoit l’évolution de la voix de cette légende du blues dont la chanson « Rollin’ Stone » qui figure sur ce disque a inspiré un groupe de musiciens anglais qui, en plus d’en faire leur nom, n’ont cessé de jouer des reprises de blues.

Mississippi John Hurt (1892-1966) n’a pratiquement enregistré qu’en 1928, sa carrière n’ayant pas décollé. Ce sont treize pistes de cette année qui forment le disque et l’on entend parfaitement le style typique de picking des cordes aiguës avec la basse jouée au pouce qui fait les beaux jours du Piedmont blues et qui sera mis en lumière par Bob Dylan notamment.

Le disque consacré à Bukka White (1909-1977) contient une piste particulière. Le guitariste, chantre du Delta Blues, originaire du Mississippi, a connu très tôt les joies de la musique et de la scène. Il enregistre dès 1930 et se trouve mêlé à une bagarre qui le conduit en prison au fameux pénitencier agricole Parchman Farm que le musicologue Alan Lomax visita pour y enregistrer des chants de prisonniers, des blues et des complaintes vernaculaires. La piste « Po Boy » enregistré en 1939 par White à cette occasion figure sur le disque.

Bea Booze (1912-1986) n’est pas la plus connue des bluswomen car d’une part sa carrière fut courte - elle se retire en 1950 - et d’autre part elle s’est fait remarquer à New York plutôt comme chanteuse de jazz avec l’orchestre de Sammy Price. Néanmoins, on trouve sur ce disque des enregistrements de 1942, 1944 et 1947 en petite formation sur lesquels la chanteuse et guitariste est à son avantage. Bien sûr, sa version de « See See Rider Blues » composée par Ma Rainey figure sur le disque. Cette version a atteint la première place au Harlem Hit Parade du magazine Billboard en 1943.

Ces quatre rééditions en vinyle à l’esthétique léchée sont disponibles sur le site de Night Records, avec les autres Ma Rainey, Skip James, Bessie Smith, Leadbelly, etc.. et Robert Johnson (malheureusement épuisé).