Tribune

Steve Dalachinsky par Richard Comte

Steve Dalachinsky nous a quittés. Il allait avoir 73 ans. Il a joué avec les plus grands. Sur son lit de mort, avec sa femme Yuko, il écoutait Jackie McLean, Monk, Coltrane, Taylor. Comme dirait Noël Akchoté, il est jazz.


Steve Dalachinsky l’Archipel par Guy Sitruk

Témoignage d’une rencontre, de ce qu’il nous reste.

C’est Makoto Sato qui nous a présentés et réunis pour jouer à trois occasions.
Lors de notre premier concert, je ne m’étais pas encore intéressé à la poésie américaine : c’est par le son que la rencontre s’est faite. Steve Dalachinsky donne à écouter cet américain de New-York avec ses phonèmes et ses accents dans une dynamique sonore d’où jaillit du sens, des images, une architecture qui donne une forme à nos improvisations. Il utilise ses textes comme une matière qu’il brasse sur l’instant, qu’il remet sans cesse en jeu dans un flux comme le ferait un musicien improvisateur. J’ai été frappé par l’aspect brut et radical de sa pratique où tout part d’une nécessité intérieure dans le geste d’écriture comme dans le fait d’incarner ses textes, de leur donner vie avec force et conviction.

Son rapport à sa ville me fascinait. Il vivait avec elle dans un amour-répulsion que connaissent bien les citadins. Il s’en plaignant très souvent, du manque d’espace surtout, et pourtant il ne pouvait clairement pas la quitter en dehors de ses voyages. Elle faisait partie de lui, l’inspirait, le nourrissait en tous points. Il y avait quelque chose d’organique dans sa relation avec sa ville, comme si elle lui donnait un point de vue, la matière et l’énergie pour penser le monde. Sa ville, où a régné depuis la fin des années 60 un sentiment de liberté particulier, tous ces courants artistiques qu’il épousa, côtoya, auront étés libérateurs pour les artistes et de puissants vecteurs de liberté.

Il portait en lui cette liberté qu’il a su partager généreusement, jusqu’à son dernier jour et c’est aujourd’hui ce qu’il nous reste.

par // Publié le 29 septembre 2019
P.-S. :

Vidéo d’un concert de novembre 2017 au Chat Noir (Paris) par Annie Zivkovic, alias Nilonilaz