Chronique

Tony Moreno Quintet

Short Stories

Marc Mommaas (ts), Ron Horton (tp), Jean-Michel Pilc (p), Ugonna Okegwo (elb), Tony Moreno (dms).

Label / Distribution : Mayimba

Lorsqu’on s’intéresse à Tony Moreno, on est impressionné par son parcours. Fils de Nina Dunkel Moreno, harpiste et pianiste, il commence le piano à l’âge de quatre ans. Puis c’est auprès de Stan Koor qu’il débute la batterie, âgé de dix ans seulement. Sa mère l’emmène assister à un concert d’Elvin Jones, duquel il obtiendra son premier kit de batterie quelques jours plus tard. Jones deviendra son professeur pendant six ans et restera son mentor, même si l’apprenti batteur peaufinera son jeu auprès d’autres grands noms tels que Art Blakey, Al « Tootie » Heath, James Preiss, Freddie Waits et Bob Moses. Aujourd’hui, avec plus de 100 enregistrements à son actif, l’élève est devenu maître et enseigne à son tour.
A l’âge de 15 ans il s’installe à Westbeth, une résidence d’artistes, où il restera 42 ans. Jusqu’à ce qu’en octobre 2012, l’ouragan Sandy détruise absolument tout. D’une carrière aussi riche, il ne reste que des souvenirs. Outre les instruments, le studio, ce sont également les trophées de sa mère, les objets accumulés au fil des ans qui ont disparu.
Le 55 Bar à New York, Greenwich Village, a alors proposé à Tony Moreno de s’établir en résidence pour un mois avec son quintet. C’est au cours de cette période de reconstruction que le groupe a conçu les 15 titres qui figurent sur ce double album, Short Stories. Quinze courtes histoires pour se relever de l’anéantissement d’une longue histoire. Ce disque est le point culminant d’un travail de quatre ans. Entouré de ses proches, Tony Moreno en a fait un processus de reconstruction, selon ses propres mots.
Dès les premières notes de « Foxy Trot », le quintet nous plonge dans une atmosphère d’abord inquiétante, suspendue, puis très vite une énergie émerge, se dégage de la stupeur, comme la vie qui reprend ses droits, irrémédiablement, quoi qu’il arrive. Au fil de ces quinze compositions, le quintet conduit par Moreno regarde l’avenir dans la plénitude du moment présent, ce que le très rythmé « Three for D’reen » incarne à merveille. Marqué par quelques respirations, comme avec le magnifique « C Jam Blues » de Duke Ellington, ou l’endiablé « Groveling » de Ron Horton, Moreno assène des compositions solides et variées. Un disque construit, qui célèbre la vie tout au long de quinze courtes histoires. Et sans doute la plus belle réponse possible à la dureté du sort.