Scènes

Trio Journal intime : sortie de « Lips On Fire »

Sorti sur le Label Ouïe, « Lips On Fire » est une réécriture de la musique de Jimi Hendrix à trois voix cuivrées, avec deux invités : Denis Charolles et Rodolphe Burger.


Mercredi dernier le Lavoir Moderne Parisien célébrait la sortie de disque du trio Journal intime, Lips On Fire, qui ne sera disponible qu’en… février. D’ici-là, rendez-vous sur leur site, ou à la fin des concerts ! Sorti sur le Label Ouïe, Lips On Fire est une réécriture de la musique de Jimi Hendrix à trois voix cuivrées, avec deux invités, Denis Charolles et Rodolphe Burger.

La neige n’a pas eu raison des spectateurs, le Lavoir Moderne Parisien (Paris, XVIIIè) est plein ! Le concert du 1er décembre 2010 a même donné naissance à un petit frère (le lendemain) tant il a eu de succès. Pourtant quatorze personnes se sont désistées – à cause de la défection de Rodolphe Burger ? Pour des raisons de santé, le phénix des hôtes de ces bois ne nous tiendra pas compagnie, pas plus que Jacques Higelin, à qui la meilleure place était réservée… en vain. Denis Charolles est, lui, bien présent.

Si l’on rend régulièrement hommage à Burger ce soir, la musique ne se ressent pas de son absence : aucun manque ni trou, le trio emplit la salle avec magnificence. C’est du Hendrix remâché, redigéré, recraché que l’on nous sert. Méconnaissable. Trois cuivres ? Qu’est-ce que ça pulse ! Sylvain Bardiau (trompette et tee-shirt Jimi), Frédéric Gastard (saxophone basse, col roulé rouge et veste militarisante) et Matthias Mahler (trombone et slim noir) cassent la baraque. Il n’y a pas d’autre mot. Excellents musiciens, on le savait ; rythmiciens enthousiastes, on le devinait ; passeurs passionnés, on le découvre.

Denis Charolles © H. Collon/Objectif Jazz

« Fanfare de poche, orchestre symphonique ou guitare électrique » ? Journal intime est tout ça à la fois, et plus encore. Trois voix polyphoniques emplissent l’espace de la belle salle aux murs de pierre du Lavoir Moderne, devant un parterre de têtes levées et dodelinantes. Leur volume sonore, aux deux sens du terme, est si puissant que, les yeux fermés, on croirait à un big band. Les premiers morceaux sont réservés au noyau tripartite de la soirée, le deuxième, « Viens », est une composition de Gastard. Vents, percussions, sons transformés, le bâton hendrixien circule de manière fluide et rapide. Réécrite pour trois cuivres, la guitare passe de bouche en bouche tout au long du concert. « Dans le rôle de Jimi, … », annonce-t-on à chaque pièce, « …Denis Charolles ! ». Voix rauque et accent frenchy, celui-ci, en plus de la batterie, parle-chante la balade « Angel ».

Introduction par-ci, solo par-là, on nous explique comment est construit l’hommage : par collages et dé-re-compositions. Un live, un enregistrement, une vidéo sur internet, Journal intime fait feu de tout bois. Mis à part le tube « All Along The Watchtower », ce sont beaucoup de trésors cachés. « Lover Man », « Hey Baby », « If 6 was 9 », « Foxy People » : amour, sexe et… politique, pour un morceau où Hendrix évoque les origines des uns et des autres, et les problèmes (imaginaires) qui vont avec, occasion pour le bavard Gastard de lancer une allusion à l’actualité brûlante et piquante. Puis vient le tour des invités surprises : Rémi Sciuto au saxophone (alto et soprano) et aux claviers et Lou, chanteuse à la jolie voix rock pour un morceau de… PJ Harvey ! Si Lou n’intervient qu’une fois, Sciuto a le temps de démontrer ses talents d’improvisateur avec un magnifique solo de soprano.

Les Lips On Fire, ce sont celles des trois souffleurs marathoniens, de Jimi Hendrix chantant à la renverse, et aussi les nôtres, qui réclament à corps et à cris un rappel, accordé avec plaisir sous la forme d’un bon vieux rock des familles qui met le feu aux planches.