Chronique

Yves Budin

Visions of Miles

Yves Budin (textes et dessins), Philippe Haulet (conception graphique)

En 2003 le peintre, dessinateur et illustrateur Yves Budin monte le projet Visions of Miles, un album de dessins et de poèmes consacré à Miles Davis que la maison d’édition bruxelloise Les Carnets du Dessert de Lune ont publié en février 2007.

Ces dernières années, Budin s’est fait un nom dans le monde des illustrations autour du jazz. Ses tableaux ornent des pochettes de disques, des sites, des Unes de magazines (Jazzman n°117 d’octobre 2005)… En parallèle, il expose beaucoup à Liège, Bruxelles et dans divers festivals de jazz.

Visions of Miles est préfacé par le musicien, compositeur, chroniqueur, auteur, producteur… Marc Moulin, et par le conservateur de la désormais célèbre Maison du Jazz de Liège, Jean-Pol Schroeder. Les deux préfaces tournent évidemment autour du trompettiste et de la mise en images poétiques de sa vie. Moulin constate qu’« Yves Budin exprime à merveille cette tension jamais résolue, celle d’un artiste malgré lui et malgré tout » et Schroeder propose judicieusement d’ouvrir le livre et de se servir une Chimay bleue… « […] Écoutez de tous vos yeux ces visions of Miles »…

Un mot sur l’objet lui-même. L’album est au format A4 et en orientation paysage. Cette ’élégance est renforcée par la qualité du papier, Green Top et Bouffant - les spécialistes apprécieront. La typographie mélange la fonte Typewriter – style machine à écrire - pour la page de garde et certains titres, et Trixie (merci à l’éditeur pour ces précisions !).

La mise en page de Philippe Haulet est aérée : marges larges, un ou deux dessins par page. Les légendes se présentent comme autant de petits poèmes. En pied de page, en leitmotiv à côté du numéro, une vignette d’un centimètre représente une silhouette de trompettiste cambré, flanqué de son ombre. Coiffé d’un béret, il pourrait aussi bien être Dizzy Gillespie que Miles Davis.

Les textes de Budin adoptent un ton soit familier, voire vulgaire, qui évoque celui de Miles Davis - « Faut que tu piges une chose avant d’aller plus avant. Tu vois mon pote, Miles, il vient du Midwest […] » (p. 27) – soit poétique : « Vide et glauque / Homme creux / La dope est aux commandes / Toujours plus de dose » (p. 33). Les œuvres de Budin rappellent parfois Alechinsky comme le remarque judicieusement Moulin dans sa préface, et peut-être aussi Hans Hartung pour les fonds. Quant aux personnages, on retrouve l’influence d’Hugo Pratt et un va-et-vient entre silhouettes et gros plans, minimalisme et surcharge, mais avec toujours un souci évident d’esthétisme pictural.

La qualité de l’impression, le raffinement de la mise en page, les textes poétiques et les illustrations ambitieuses de Budin font de Visions of Miles un livre d’esthète d’une élégance rare.

par Bob Hatteau // Publié le 4 juin 2007
P.-S. :

Les Carnets du Dessert de Lune – 2007 – 68 pages – Prix indicatif : 24 €.