Chronique

Oxyd

The Lost Animals

Alexandre Herer (Rhodes), Julien Pontvianne (ts), Olivier Laisney (tp), Oliver Degabriele (elb), Thibault Perriard (dm)

Label / Distribution : Onze heures onze

Plus de dix ans d’activité. Cinq albums. Des concerts en pagaille. Une reconnaissance du milieu. Oxyd fait aujourd’hui partie du paysage du jazz hexagonal, au même titre que Onze Heures Onze, le collectif dont il constitue l’une des multiples ramifications. On retrouve d’ailleurs dans Oxyd les trois fondateurs du collectif (devenu également label) : le pianiste Alexandre Herer (Onze Heures Onze Orchestra, Fanfare XP et à l’origine du projet Oxyd), le trompettiste Olivier Laisney (Slugged, Fanfare XP) et le saxophoniste et clarinettiste Julien Pontvianne (Aum grand ensemble, WATT, Kepler).

Ces trois-là n’ont pas leur pareil pour fomenter des projets d’une rare originalité qui bousculent les codes établis, mélangeant les langages, les intentions, les sensibilités. Et s’ils sont aujourd’hui largement reconnus comme des expérimentateurs de premier plan, il ne faudrait surtout pas omettre leurs qualités d’instrumentistes qui font de chacun d’eux une référence sur leurs instruments respectifs.

Cornaqué dès l’origine par le pianiste Alexandre Herer, Oxyd est devenu une hydre à cinq têtes où compositions et arrangements sont élaborés en commun. Outre les trois musiciens cités plus haut, Oxyd c’est aussi et surtout une rythmique superlative, brute et puissante en la personne du bassiste Oliver Degabriele (Akalé Wubé, Festen) et du batteur Thibault Perriard (Slugged) qui propulse la musique dans des contrées sauvages. C’est bel et bien la complicité et la grande plasticité de ce duo qui supporte l’ensemble, densifiant l’espace et cimentant entre elles les différentes interventions dans la veine d’un jazz progressif, onirique et psychédélique.

Dans des ambiances de fin du monde, The Lost Animals (la pochette rappelle les fabuleux imagiers Deyrolle) met en musique la finitude des choses à travers la disparition programmée des espèces animales (chaque titre de morceau renvoie à un animal disparu il y a plus ou moins longtemps). Une musique hypnotique et répétitive, d’un minimalisme foisonnant, capable à la fois d’une énergie sèche et d’une douceur apaisante. Construite autour de lentes progressions harmoniques, irisée de petites touches de couleurs autant que de grands aplats, émaillée d’un mélange chatoyant de timbres et de textures, la musique d’Oxyd témoigne d’une grande sophistication et d’arrangements très ouvragés.