Chronique

Dominic Miller

Silent Light

Dominic Miller (g, elb), Miles Bould (dm, perc)

Label / Distribution : ECM

Il est rare de voir un musicien nommer sa musique avant autant de clarté : Silent Light, lumière silencieuse, ou le nom d’un album aussi transparent que le ciel azur qui s’étale, lui et sa poussière de nuages, sur toute la surface du recto de sa pochette.

Parfaite image d’une musique en suspension, sans épaisseur : un son de guitare limpide, doublé parfois de quelques percussions, renforcé d’une basse électrique à l’occasion (« Chaos Theory ») ; des ballades légères, aux chemins tout tracés, sans ornières, ni surprises, et surtout sans mauvais orages qui viendraient compromettre sa rassurante simplicité. On revient toujours au même point, sec et indemne, sous cette lumière sans éclair. Car rien ne vient troubler la légèreté, la facilité avec laquelle les onze titres se déroulent et s’enchaînent. Nuages immobiles par beau temps d’été. Même « Fields Of Gold », reprise aisément reconnaissable de Sting avec lequel le guitariste argentin a beaucoup tourné et même cosigné des titres, même cette chanson est jouée avec si peu de travers, si peu d’excentricité, que sans le savoir, passé cette petite sensation de l’album, c’est-à-dire une fois l’avoir écoutée, on a déjà filé tout droit vers les derniers morceaux : « Tisane » et « Valium ». Et puis, « Le Pont » franchi, le disque est terminé. Autour : même silence, même ambiance qu’au tout début de la journée. Alors que s’est-il passé ? Autant de musique pour, dans l’air, ne rien faire vibrer ?

Heureusement, il y a ces mains que l’on entend glisser, pincer, tirer, tordre, presser ou brusquer les cordes de nylon et même tapoter la caisse parfois. Heureusement, sous le soleil clément qui rayonne dans l’infini du ciel bleu, au travers de mélodies trop solaires, se glisse partout l’ombre d’une matière. À l’image de ces fils sombres sur lesquels viennent se poser quelques oiseaux sur l’image qui orne l’album, on entend quelque chose, si l’on est distrait, quelque chose de fin mais de substantiel : ce sont, au milieu de cette musique aussi diaphane que vaporeuse, les gestes impénétrables et denses d’un excellent musicien.