
Après avoir promené sa basse dans des groupes avant-gardistes tels qu’Univers Zéro, Present et X-Legged Sally, Guy Segers s’est pleinement investit dans l’Eclectic Maybe Band. Il enregistra tout d’abord The Blind Night Watchers’ Mysterious Landscapes il y a onze ans en compagnie de la pianiste Catherine Smet, du guitariste Michel Delville, du claviériste et saxophoniste Joe Higham et du batteur Dirk Wachtelaer. Nous les retrouvons dans ce cinquième album, Cosmic Light Clusters.
Le mot Cosmos désigne l’ordonnancement de l’univers, à l’image des dix morceaux disparates qui se succèdent dans cet album. La pochette rappelle celle de l’album Islands de King Crimson, marqué par le jazz improvisé, ce qui avait désorienté les fans du groupe. Guy Segers prend lui aussi un malin plaisir à échafauder des plans musicaux qui, une fois lancés sur les rails, dérivent afin de s’engager dans de nouvelles directions. De nombreux artistes internationaux viennent se greffer sur le noyau central de la formation par le biais d’enregistrements additionnels. On remarque les Français Franck Cottret et Jean-Pierre Soarez, autrefois membre d’Art Zoyd, l’Espagnol Ángel Ontalva, l’Allemand Stephan Köhr, le Suédois Jimmy Ågren : autant de fortes individualités.
Véritable tour de force, « Hypnopédie » intègre simultanément trois textes novateurs. « The Rain », écrit par la Grecque Eleni « Silena » Siozou, « Firelight », issu de la plume de la Japonaise Mami Foujita et « Vibration », composition de la Britannique Cathryn Robson. Ce trio vocal s’impose de manière complémentaire et ne forme alors plus qu’un univers singulier. Des formules rythmiques dynamiques unissent le Japonais Tatsuya Yoshida et l’Américain Rich O’Meara dans « Ordinary Undercover Radar ». La frappe vigoureuse de Sean Rickman, aussi à l’aise dans ce contexte qu’avec Steve Coleman, soutient les grandes formations qui façonnent « Bottle Opener » et « B2 Or Not 2B / Astrum Argentinum ». Cette composition où surgit la voix sombre et inquiétante de Cathryn Robson referme pudiquement l’album.
Cosmic Light Clusters célèbre l’expérimentation et s’oppose à toute forme de prévisibilité. Le talent de Guy Segers permet d’atteindre un juste équilibre entre les parties improvisées et écrites. Les climats en clair-obscur hérités de la scène RIO chère à Chris Cutler trouvent ici de nouveaux échos.