Chronique

Joëlle Léandre

Solo « Duende »

Christian Pouget (réalisation)

Oubliez tout, le temps qui court, les certitudes et les manifestes esthétiques. Joëlle Léandre nous apparaît dans dix séquences filmées par Christian Pouget, dans une véritable mise à nu de l’artiste.

C’est autour du corps massif de la contrebasse que tout se joue, en extérieur et en intérieur. Les lieux se succèdent avec une imagination tout aussi fertile que les musiques qui nous sont proposées. L’inspiration poétique est la première des évidences éclatantes de Duende, la danse, le chant et la musique sans oublier l’aspect originel de ce mot d’origine hispanique, le lutin. Joëlle Léandre nous enchante dès les premières images ; la circularité qui gravite autour d’elle et de son instrument dans la forêt d’Occitanie apporte un lâcher-prise nécessaire à l’élévation musicale.

L’utilisation du noir et blanc sert la musique sous toutes ses formes. L’obscurité fascinante de « Druidessa », les racines symboliques, le bois encore, la contrebasse et son retour au monde originel. « Blues Roots », joué en intérieur à Val Cenis, n’est-il pas un écho aux Alpes environnantes ? La musicienne a cette capacité d’abattre des montagnes afin d’ouvrir les consciences. Le réalisateur absorbe l’énergie dégagée par ses musiques en obtenant une restitution poétique, comme dans « Masques » qui se confronte au minimalisme. La Catalogne, terre d’inspirations, donne ici naissance à « Khaos » où contrebasse et voix s’unissent, une prestation restituée avec subtilité par Christian Pouget.

Duende, production indépendante de Films Utôpïk, n’est pas un documentaire : ses images laissent entrevoir des partitions organiques, surprenantes comme l’est la vie. Les prises de vue changent radicalement lors de ces dix performances, tout comme les improvisations sincères de Joëlle Léandre.