Scènes

Éclectique : Tremplin Jazz en Nord

Trois groupes régionaux pour le Tremplin Jazz en Nord / Golden Jazz


Thomas Gonzales Trio © Christophe Declercq

Ce 30 janvier 2015, la Maison Folie Beaulieu de Lomme accueillait trois groupes régionaux pour le tremplin Golden Jazz, organisé par Jazz en Nord et la société Golden Eyes.

Chaque groupe finaliste a 30 minutes pour convaincre avec une figure imposée : « Nica’s Dream » d’Horace Silver. Le Trio Forge remporte le Prix du jury, soit 1000€, et un passage à Jazz à Vienne, les Old Chaps celui du public (500€). Pour le plus grand plaisir des quelque 200 spectateurs et du jury [1], les performances sont à la mesure des enjeux : stimulants et prometteurs.

Trio Forge © Christophe Declercq

Thomas Gonzales Trio : ouvrir des espaces.

Le rythme d’abord, l’harmonie ensuite, la mélodie enfin. Telle est la hiérarchie assumée de ce trio piano-basse-batterie qui, se considérant comme « pop/jazz », sait offrir des ballades aérées, toujours ascendantes. « Equilibrium », composition du pianiste Nicolas Michiel, est presque éponyme tant l’organisation du trio est homogène et horizontale - le batteur Thomas Gonzales dirige mais n’impose pas. À l’image du trio, Nicolas Michel a un jeu souple, égrené et tout en résonances. À la contrebasse, Gauthier Dubis affectionne les walking bass et l’uptempo. Tous les trois maîtrisent le groove, la syncope et les cassures de rythme régulières. Un trio lyrique qui illustre la volupté et les envolées.

Trio Forge : l’ivresse est une prouesse.

Force, précision et relâchement. Le style est free sans être expérimental. Au piano, le jeu de Pierre Cretel est à l’image de sa gestuelle : incarné et articulé. Sébastien Deweale à la batterie et Sébastien Dochy à la contrebasse fixent constamment Cretel du regard. Leur tempo détermine celui du pianiste. Il en ressort un jeu de course fait d’accidents, ruptures et virages. Le décor dramatique instaure une tension cinématographique, de celles qu’on retrouve chez Hitchcock. Le trio explore et déploie ses chorus, par épuisement des recours physiques et techniques. Sur « Corrida », composition du trio, plus on avance, moins on se repère, et meilleure est l’ivresse. S’il fallait trouver une référence, ce serait la Triple Entente de Daniel Humair, Joachim Kühn et Jean-François Jenny-Clark.

Old Chaps  : dépoussiérer en dansant.

Un sextet chant, trompette, sax ténor, guitare électro-acoustique, contrebasse, batterie où tous les musiciens n’ont pas une formation jazz. Peu importe, car ils sont très efficaces. Cette troupe fait danser le twist sans effort sur des standards percutants, oscillant entre le swing, le rythm’n’blues, le new orleans et les chansons de Broadway. Le timbre d’Audrey Leclercq évoque celui de Bessie Smith, de Duffy voire de Liliboy du groupe Deluxe lorsqu’elle flirte avec le rap. Les arrangements rappellent ceux du groupe ligérien Funk You Very Much ou des Toulousains du Bardi Manchot. Cette grande famille est une célébration permanente, qui rend hommage à ses influences en les rafraîchissant.

Old Chaps © Christophe Declercq

In fine, il semble que le public ait privilégié la spontanéité et le jury l’effort de création. Le trio Forge sera donc cet été à Vienne. Les trois concerts sont diffusés le 21 février sur WeoTV. Le prochain tremplin Golden Jazz Trophy (5 juin) sera présidé par Bojan Z. Cette fois, tous les excellents candidats non-régionaux que le jury n’a pu retenir auront leur chance de faire leurs preuves.

par Thomas Perroteau // Publié le 23 février 2015

[1Bruno Watine (fondateur et mécène du Golden Jazz Trophy), Dominique Desmons (directeur de Jazz en Nord), Benjamin Tanguy (programmateur à Jazz à Vienne), Yann Subts (directeur de l’A.C.T Tourcoing Jazz) et Arnaud Becaus (pianiste), Nicolas Ammeux (directeur de la maison Folie Beaulieu), Dominique Capelle (vice président de Jazz en Nord) et Claude Colpaert.