

Emily Remler
Cookin’ At The Queens - Live In Las Vegas 1984 & 1988
Emily Remler (g), Cocho Arbe (p), Carson Smith (b), Tom Montgomery (d), John Pisci (d).
Label / Distribution : Resonance Records
En dépit des avancées certaines dues au mouvement #MeToo, le sexisme reste d’actualité et le jazz n’a pas été épargné par cette forme de discrimination. Les paroles d’Emily Remler sont toujours édifiantes : « Quand je quitte la scène, c’est là que les gens me rappellent que je suis une femme ».
Née à New-York le 18 septembre 1957, Emily Remler a commencé l’apprentissage de la guitare à l’âge de dix ans. D’abord inspirée par le hard-rock, elle tombe sous le charme des figures légendaires du jazz. Wes Montgomery devient son idole et elle se met rapidement à pratiquer l’improvisation. Emily Remler enregistre des albums mémorables ; le premier sous son nom, Firefly, pose question : comment une si jeune artiste peut-elle avoir autant de maturité ? Elle publie deux albums fabuleux en quartet, Transitions et Catwalk avec John D’earth, Eddy Gomez et Bob Moses et un inoubliable disque en duo avec Larry Coryell, Together.
Cookin’ At The Queens relate deux soirées au 4 Queens de Las Vegas, les 28 mai 1984 et 19 septembre 1988. Sans aucune appréhension, Emily Remler transforme « Tenor Madness » de Sonny Rollins en un tour de manège enivrant. Cocho Arbe est le pianiste idéal pour cette session, chacune de ses interventions solistes est audacieuse. « Cisco » de Pat Martino célèbre la tendresse, la conception des figures rythmiques dispensées tour à tour par Tom Montgomery et John Pisci rehaussant la complexité des jeux d’accords de la guitariste. Les idées fusent de toutes parts : « How Insensitive (Insensatez) » se pare d’un sens prononcé de la mélodie, le solo de Carson Smith mêle douceur et punch, tout comme dans « All Blues » qui subit ici une cure de rajeunissement. Emily Remler s’affranchit au maximum de toute règle préétablie, son toucher unique qui illumine le standard « Out Of Nowhere » et sa maîtrise de l’harmonie dans « All Blues » et « So What / Impressions » subliment la notion de swing. Les improvisations et les compositions se nourrissent mutuellement avec frénésie tout du long de cet album.
Emily Remler a été retrouvée morte dans sa chambre d’hôtel le 4 mai 1990 à Sydney lors d’une tournée, elle avait trente deux ans. La cause officielle du décès était une insuffisance cardiaque, mais depuis des années elle luttait contre des addictions à l’héroïne et au Dilaudid, analgésique opioïde. De nos jours, la guitariste Sheryl Bailey perpétue la mémoire de cette femme semblable à un météore qui a fait flamboyer le jazz et qui s’est consumée trop vite.