Evelyn Davis-Fred Frith-Phillip Greenlief
Lantskap Logic : Hidden Danger Lets Me In
Evelyn Davis (org), Fred Frith (elg), Phillip Greenlief (cl, as).
Label / Distribution : Clean Feed
Ce disque n’est en rien le fruit du hasard : ces trois artistes témoignent ici d’un évènement particulier qui donne naissance à Lantskap Logic : Hidden Danger Lets Me In. Quasiment dix années après l’enregistrement d’un premier album au fameux Mills College d’Oakland, Evelyn Davis apprend que cette institution va être vendue. Le Département de Musique, reconnu depuis plus de soixante-dix ans comme un champ d’expérimentation unique, n’échappe pas à la funeste règle. En 2013, cette claviériste y a terminé ses études supérieures juste avant d’y enseigner. Fred Frith y fut professeur de composition et Phillip Greenlief, producteur et organisateur de concerts dans la Bay Area, a des liens indissociables avec l’établissement. Au vu de cette situation troublante, le trio décide alors d’enregistrer rapidement ce second disque, de nouveau dans la chapelle Mills, dotée d’un excellent orgue.
Le premier album de ce trio témoignait d’improvisations radicales ; Lantskap Logic : Hidden Danger Lets Me In évolue plutôt dans des zones où les tensions larvées sont nombreuses. À la deuxième minute de « Hold The Heart », une progression harmonique rappelle les climats développés naguère par Fred Frith et Tim Hodgkinson dans l’ultime mouture de Henry Cow. L’imagination fertile de Phillip Greenlief galvanise ses partenaires ; il échafaude un discours entre susurration et souffle continu. L’orgue est joué de façon à provoquer des remous dans le déroulement musical, il ponctue et modifie constamment la linéarité du groupe. Dans la longue pièce « The Sail Makers », Evelyn Davis influe sur l’espace-temps ; à la quatrième minute elle agit subtilement sur les tensions musicales. Fred Frith se fraie son chemin et refuse tout conformisme, ses détails rythmiques enrichissent le discours tout autant que ses stridences électriques.
Inspiré par l’anéantissement d’une entité musicale, ce disque demeure très abouti, une mélancolie s’en dégage à l’image d’un requiem.