Tribune

Jaap Blonk déclame ses poèmes au Souffle Continu

Retour en images animées sur la prestation du déclameur hollandais Jaap Blonk lors de sa soirée dans la librairie Le Souffle Continu, le 25 juin 2019.


Jaap Blonk © Guy Sitruk

Sa spécialité ? Déclamer des poèmes sonores, des poèmes où les syllabes comptent davantage que les mots, où la manière de dire compte autant que ce qui est dit. C’est de la musique de mots, un peu le contrepied du chanté-parlé cher aux compositeurs sériels du début du XXe siècle.

Jaap Blonk est un artiste très particulier.

Il commence d’ailleurs sa prestation par le premier poème sonore qu’il a appris, dû à Hugo Ball, écrivain et poète dadaïste allemand, né en 1886 en Allemagne.


Mais il n’en reste pas qu’aux poèmes. Il nous délivre aussi de micro-drames, des saynètes où la barrière de la langue s’évanouit. Prenez un cauchemar. Comment le jouer en sons ? On peut toujours commencer par ronfler, avec une pointe de dérision. Puis des grognements, des diffusions électroniques (un micro portable piloté par une manette de jeu), des syllabes en cataractes, des éructations … C’est court, mais on est déjà loin.


Une forme de théâtre ? Non, toujours de la musique, certes minimale lorsqu’il s’empare d’un chant sans note, d’un discours sans mots, voire sans syllabes à l’image du celui du poisson : deux sons muets figurés sur une grande feuille par deux signes distincts. Au début, on ne voit pas le lien entre cette feuille et ce qu’il nous joue, puis on comprend que c’est une partition, on sourit de plaisir, on applaudit.
Et comme il est en France, ce néerlandais nous envoie en miroir l’un de nos Van Gogh de la langue, Antonin Artaud, pour un hommage tout d’humour et pour une pirouette de fin.


Ce qui stupéfie, c’est l’extraordinaire plasticité de sa voix, ce talent fou qui nous fascine avec très peu de moyens. C’est une « bête de scène » et un virtuose. Il touche autant au cœur et à nos tympans qu’à notre esprit. Il swingue avec les syllabes, les sons, le souffle… C’est un artiste hors norme.

Il vient de publier, outre un recueil de poèmes et d’œuvres graphiques, un album en trio, disponible chez votre disquaire (distribué par ToonDist) et sur Bandcamp.

On ne peut qu’être reconnaissant au Souffle Continu, animé par Bernard Ducayron et Théo Jarrier, de nous offrir ce type de rencontres, de nous faire découvrir des musiques nouvelles. Elles nous désarçonnent parfois, elles nous séduisent souvent.