Chronique

Jan Schumacher Quartet

Windstille

Jan Schumacher : tp, bugle, comp ; Richard Turegano : p ; Mauro Gargano : cb ; Giuseppe La Pusata : dr ; Invités : Gueorgui Kornazov : (trb) (2, 4, 6) ; Gregsky : (ss) (5) ; Philippe Foch : Tablas, Bendir, Gattam (1, 2, 3, 5, 6)

Label / Distribution : Cristal Records

Jan Schumacher quartet est un des quartets les plus enthousiasmants qu’il nous ait été donné d’écouter ces derniers temps, de ce côté-ci de l’Hexagone. Un quartet qui évolue aux confins d’un jazz moderne et d’une world music délivrée à petites touches. Car, alors que certains veulent faire une world jazz en tournant autour du pot, assaisonnant trop ceci et pas assez cela, collant ensemble des clichés stylistiques, au contraire Schumacher ne semble pas se poser ce type de question.

C’est que son écriture intègre des condiments qui lui semblent naturels. On est alors dans un jazz formidablement modernisé. Une sorte de mix entre l’écriture du Paris Jazz Big Band et l’énergie du quintet de Dave Douglas. Tout y est emballant : écriture superbe mariant la finesse du propos et la sauvagerie des embardées, alliages fins avec la world grâce à la judicieuse intervention des tablas, à quelques mélismes esquissés et aux formidables interventions de solistes.

Les solistes ! parlons-en. Bien sûr, Schumacher- éclatant et puissant, très inspiré. Un trompettiste comme on les aime, de ceux qui mordent dans l’instrument sans rien perdre en groove. Freddie Hubbard avait ça en lui. Il est épaulé sur certains morceaux par le tromboniste Gueorgui Kornazov (qui, pour les amoureux du Strada sextet de Texier n’est pas un inconnu) qui apporte dans ses bagages un « growl » terrible et sauvage. On entend dans son jeu le vertige des grands espaces, des steppes imaginaires et la charge fantastique des chevaux sauvages. Derrière la rythmique est d’une efficacité à faire des envieux un peu partout. Il est vrai que le quartet, qui existe depuis 10 ans, se connaît parfaitement et maîtrise la science de l’interaction, mais surtout de ce groove qui, de bout en bout, ne lâche pas l’album et maintien l’auditeur dans un état d’éveil constant. Un groove où peu surgir à tout instant quelques irruptions sauvages. Des écorchures. Des traits saillants. Qu’il s’agisse de « Mallorca » ou de « Consternation », on navigue alors entre les divers idiomes du jazz, et peut-être même du blues. L’esprit des bandas où les cuivres apportent un surcroît de soleil méditerranéen achève de nous emporter dans ce magnifique tourbillon.