Scènes

Nkaké : sous l’énergie, la tendresse

Sandra Nkaké « Tangerine Moon Wishes » en concert


« Tangerine Moon Wishes » par Jean-François Picaut

Après le festival de Bourges, la chanteuse se produit dans une petite ville bretonne.
Pour clore sa première saison après sa métamorphose, La Confluence à Betton (Ille-et-Vilaine) avait invité Sandra Nkaké et son quartette pour « Tangerine Moon Wishes ». Bonne pioche, la chanteuse a fait un tabac.

Précédée par la flûte traversière de Jî Drû, dont chaque intervention est un régal par son à-propos et sa musicalité, Sandra Nkaké fait une entrée majestueuse, drapée dans cette longue robe orangée (rousse ?) qui est la couleur de Tangerine Moon Wishes (Jazz Village, 2017).

Sandra Nkaké©Jean-François Picaut

On tombe immédiatement sous le charme de cette voix unique, plus chaleureuse que jamais avec ses graves à la profondeur fastueuse et ses aigus charnus et clairs, sans oublier ce souffle légèrement voilé qui la ferait reconnaître entre mille. L’album, non dépourvu d’énergie, faisait la part belle à la quête intérieure, au voyage initiatique et sensible. Sur scène, le dynamisme l’emporte sur l’intime qui ne perd pas tous ses droits. On le retrouve notamment dans les admirables textes en français (moins nombreux, me semble-t-il, que dans l’album) : « C’est un théâtre de verdure, une grande vallée au coucher du soleil… » ou « J’ai ouvert mon cœur et mon monde… ». Dans « The Last Journey », une partie chantée a cappella prend une dimension quasi religieuse.

Néanmoins, dans ce concert, dominent le dynamisme et une force venus du rock et de la pop. En témoigne la forte présence (parfois indiscrète pour mes oreilles) de la batterie (Matthieu Penot et de la basse (Kenny Ruby) qui mènent rondement le train. Naturellement discrète, Tatiana Paris effectue un remarquable travail harmonique et mélodique à la guitare et elle sait révéler sa virtuosité quand les circonstances s’y prêtent.
Dans un entretien qu’elle nous avait accordé en décembre dernier, Sandra Nkaké insistait sur l’importance que revêtaient à ses yeux les lumières et la chorégraphie, fût-elle simple. C’est une réussite totale. La lumière sculpte ses attitudes et met en valeur les mouvements d’ensemble des musiciens. Ses mouvements, naturellement gracieux et fluides, sont soulignés sans esbroufe par une chorégraphie qui, pour être simple, n’est en rien pauvre. Ah, cette apparition presque finale de la Lune ! Le talent naturel de comédienne de la chanteuse s’exprime pleinement dans ce cadre.

Sandra Nkaké à La Confluence à Betton

Le public, plutôt jeune voire très jeune (surtout les filles) a accroché dès les premières minutes. Le charisme de Sandra Nkaké et de ses musiciens a fait croître le charme jusqu’à plusieurs ovations debout. Ce public, qui a apprécié la force et l’engagement de la chanteuse, n’aura sûrement pas manqué d’être touché par la profonde humanité de cette grande dame.
Revenue auprès du public, à peine le concert fini, elle a signé très longuement des autographes, sur des disques certes, mais aussi sur des billets, des prospectus annonçant le spectacle, réalisant un dessin pour un enfant qui le lui demandait, répondant avec attention à toutes les questions y compris les plus enfantines, prenant la pose avec ceux qui le lui demandaient… De quoi rentrer à la maison avec de la lumière plein les yeux.